Contre toute attente, l’économie étant toujours en crise, l’année 2010 aura été favorable au marché immobilier, particulièrement à Paris où les prix atteignent des sommets. La faculté des riches à devenir plus riches n’y est, sans doute, pas étrangère.

 

Regard sur l’actualité

Les résultats donnés par les notaires de France, pour le premier semestre 2010, révèlent une amélioration sensible du marché, tant en terme d’activité que de prix. On note toutefois un écart significatif entre le marché parisien et la province. Ainsi, sur un an, les prix ont augmenté de 10 % sur Paris. En province, l’augmentation est seulement de 4 %, avec une répartition offrant de nombreux contrastes d’une région à l’autre, entre le cœur des grandes villes où les taux de croissance avoisinent celui de Paris et les environs où ils peinent à devenir positifs. L’explication fréquemment donnée à cette reprise du marché s’appuie sur la diminution des taux d’intérêt, la sécurité du placement immobilier et une offre insuffisante.

Cependant, différentes études montrent qu’il n’y avait pas de lien systématique entre l’évolution des taux d’intérêts et celle du prix des logements. Il existe, par contre, un lien étroit avec les revenus des ménages qui influencent, directement, la bonne ou la mauvaise santé de l’immobilier. C’est une des raisons pour lesquelles, depuis le début de la crise économique, les prix ont chuté un peu partout. C’est notamment le cas à New York où la baisse atteint encore 29 %. Toutefois, la situation parisienne semble contredire cet argument : les prix s’y envolent, dépassant les sommets atteints 2 ans plus tôt lorsque la reprise se faisait attendre.

Observons enfin que la crise frappe, différemment, les revenus des riches et ceux des pauvres. En France, l’Insee considère que les très hauts revenus, supérieurs à 84 500 € par personne, concernent 1 % de la population (1) française. Soit 650 000 personnes dont plus de la moitié concentrée dans l’agglomération parisienne. Comparativement, les ventes sur Paris et les 3 départements qui l’entourent, avoisineront seulement 65 000 logements en 2010. Comme la bourse a été particulièrement décevante cette année, il semble logique que l’accroissement de richesse des populations à hauts et très hauts revenus, se traduise, finalement, par une forte pression sur la demande en logements parisiens et, donc, sur les prix de l’immobilier. Cette demande importante de biens immobiliers de la part des populations aisées, directement ou indirectement par le biais de sociétés immobilières, semble aussi un facteur non négligeable dans la résolution du problème du logement. Plutôt que vouloir créer une France de propriétaires, mieux vaut faciliter la location pour les moins fortunés et leur éviter ainsi les affres des expropriations, en cas de retournement de conjonctures. Le marché des transactions n’aurait qu’à y gagner. Car si le nombre de ventes des propriétaires occupants ne dépasse pas deux cessions durant toute leur vie, ce chiffre est deux à trois fois plus élevé pour les investisseurs. Comme le fait d’être locataire ou propriétaire n’influe pas sur le nombre de logements, autant encourager les premiers plutôt que les primo-accédants si l’on veut multiplier les transferts de propriété. Les revenus des collectivités publiques dont les impôts fonciers sont la première ressource y gagneront mais aussi, à un moindre degré, les artisans de la négociation immobilière.

 

Tendance concernant l’activité

N.B. : Le graphique met en évidence un palier dans l’amélioration de l’activité des services négociation depuis deux ans.

Le nombre de compromis signés a progressé de façon continue depuis 2 ans. Or, 29 % de notre panel (contre 25 % auparavant) ont prévu une activité plus faible sur novembre et décembre. En revanche, il semblerait que le volume des ventes s’intensifie. En effet, 37 % (contre 26 %) prévoient son amélioration et la part de ceux misant sur une baisse des ventes tombe de 18 % à 9 %. Enfin, selon l’Insee, le nombre de transactions annuelles sur l’ensemble de la France n’a cessé d’augmenter. Il est passé de 593 000 à 692 000 sur le premier semestre. Soit une augmentation de 17 %. Il pourrait s’acheminer vers les niveaux d’avant crise pour la fin de l’année.

 

Tendance concernant les prix

N.B. : Depuis début 2010, les baisses de prix n’étant observées que de plus en plus rarement, la tendance générale poursuit son mouvement haussier.

La hausse des prix semble se préciser dans la plupart des régions. Que ce soit au niveau des terrains, des logements ou même des commerces, les prévisions pour la fin 2010 sont de plus en plus optimistes. En province, c’est surtout la disparition des secteurs baissiers qui influe sur ces prévisions. Ainsi, dans notre panel, 16 % de nos correspondants (contre 29 % auparavant) anticipent une baisse des prix pour les mois à venir. Mais cet engouement ne se fait pas toujours au profit des services négociation. Ainsi, la négociatrice de Me Gosse à Onzain (41) remarque « une vraie reprise au niveau du nombre d’actes de vente ». Elle note toutefois qu’il y a « énormément de particuliers à particuliers ». « Les vendeurs nous font encore et toujours plus confiance à propos des avis de valeur, mais n’hésitent plus à nous devancer et à utiliser les sites gratuits d’annonces pour rechercher eux-mêmes un acquéreur. Mais qui, au final, fait tout le travail ? Le notaire bien entendu. »

 

Le conseil des notaires

Pour le logement, il y a une certaine inadéquation entre les prévisions d’évolution positive des prix à court terme et la prédominance des conseils de vente précédant un rachat. Cela semble signifier qu’en province, contrairement au marché parisien, il devient plus difficile de céder un bien, dans de bonnes conditions, que de trouver son remplaçant. Par ailleurs, la poursuite de la hausse des prix à plus long terme laisse notre panel dubitatif. Au niveau des terrains, les proportions entre conseils à l’achat et à la vente s’inversent, les premières (46 %) dominant légèrement les secondes (44 %). L’acquisition d’un terrain demeure toujours une opération opportune, même si elle se révèle moins profitable à terme.

 

Évolution de l’environnement économique

Sur le plan international, les équilibres paraissent bien précaires, chaque amorce de solution pour résoudre la crise semblant s’accompagner de désordres nouveaux. C’est ainsi que l’injection de dollars pour faire repartir l’économie américaine se traduit par une faiblesse du dollar. Cela favorise les exportations des États-Unis, mais aussi celles de la Chine dont la monnaie, le yuan, colle au dollar. Il en résulte que ce sont les autres pays et, en particulier l’Europe, qui en font les frais.

 

NDLR : Cette enquête a été rédigée le 15 novembre. Elle porte sur les mois de novembre-décembre.

1. Il s’agit de revenus « déclarés ». Si l’on rajoute aux « très hauts revenus », les « hauts revenus » (supérieurs à 35 677 € par an, soit plus de 100 000 € pour un couple et une personne à charge), cette proportion de la population atteint 10 %.