La Conférence des notariats de l’Union européenne (CNUE) a remis à la Commission européenne, ses réponses aux 39 questions posées dans le Livre vert « successions et testaments ». Un propos ambitieux qui aborde notamment la question du critère de rattachement et préconise l’adoption du système unitaire…
C’est le fruit d’un travail approfondi que la CNUE a remis le 30 septembre dernier à la Commission européenne. Il est vrai que l’ampleur des questions posées par le Livre vert ne permettait pas d’y apporter des réponses succinctes et qu’un travail remarquable avait déjà été effectué en la matière lors des travaux préparatoires à la Convention de la Haye du 1er août 1989. Certaines réponses de la CNUE s’y réfèrent de bon droit. L’une des questions essentielles de la Commission est relative au critère de rattachement. En d’autres termes, il s’agit de savoir quel est le meilleur critère de rattachement pour déterminer la loi applicable à une succession transfrontalière et, partant de là, de définir s’il doit constituer un critère unique pour tous les aspects de la succession ?
Oui au système unitaire !
Le notariat français connaît depuis fort longtemps le système dit « scissionniste » qui soumet la succession mobilière à la loi du dernier domicile du défunt et la succession immobilière à celle du pays où sont situés les immeubles. La majorité des autres Etats de l’Union européenne connaît un système dit « unitaire » soumettant l’ensemble de la succession à une loi unique. C’est ce système unitaire qui a été préconisé par la CNUE. Il s’agira alors, lors de l’entrée en vigueur du futur règlement européen, d’une réelle « révolution » dans nos études. Un défi nous est lancé ! À nous de le relever et de montrer que le notariat est à la base de l’évolution du droit ! Partant d’un système unitaire, encore faut-il déterminer quelle loi sera applicable à l’ensemble de la succession. Un choix multiple était ouvert : on pouvait préconiser la loi du dernier domicile du défunt, sa loi nationale, la loi de son régime matrimonial ou encore la loi de sa dernière résidence habituelle. C’est ce dernier critère qui a été retenu par la CNUE. Ainsi, si le futur instrument communautaire prend en compte les préconisations de la CNUE, l’ensemble d’une même succession sera soumis à une seule et même loi : celle de la résidence habituelle du défunt. Professio juris
Dans certaines hypothèses, ce critère de rattachement peut s’avérer inopportun. En effet, un fonctionnaire en poste de façon temporaire dans un Etat tiers, pourrait souhaiter que la loi de sa résidence habituelle ne constitue pas le critère de rattachement unique. Aussi a-t-il été préconisé par la CNUE l’adoption de la « professio juris », c’est-à-dire la possibilité pour le testateur de choisir de son vivant la loi applicable à sa succession. La « professio juris » est un instrument connu d’un certain nombre de législations européennes. Cette disposition constitue à notre sens un espace de liberté et de sécurité. Bien entendu, il ne s’agira pas pour le testateur de puiser dans des législations européennes des règles visant uniquement à frauder les droits de ses héritiers, le choix doit ainsi être limité et contrôlé.
NDLR : Michiel Van Seggelen, notaire associé à Grenoble, a présidé la 2e commission du 101e Congrès national (Nantes, « les Familles sans frontières en Europe »). Cette commission qui était également animée par Bertrand Basseville (Orléans), était axée sur la transmission ; elle est à l’origine d’une proposition sur le choix de la loi applicable, vœu voté à une large majorité par la salle.