Le pavé luit. Il cesse de pleuvoir. Sous les pavés la plage. Le pavé est authentique puisqu’il brille à l’éclat du soleil revenu, mais la plage est un mythe, à peine du gravier dont le pavé l’empêche de devenir bourbier. La réalité c’est le pavé et la plage n’est que fumée.
Alors il lui fallait bien une journée : la journée du pavé, celle de l’authenticité.
À peine née, déjà enterrée, sacrifiée sur l’autel de la rentabilité, de la virtualité, voire même de la réalité virtuelle.
Mais la vraie réalité, c’est le pavé dans la mare : des comptables qui frôlent le burn-out, fuyant la profession, des clercs dévalorisés dont le seul horizon a pour limite téléactes, des notaires livrés à eux-mêmes sous la seule férule de l’autorité de la concurrence. Voilà la seule, l’unique authenticité d’aujourd’hui, une réalité mortifère, décelable à défaut d’être palpable à l’instar d’un parasite qui la phagocyterait pour lui ressembler étrangement.
Marianne ne s’y trompe pas ; elle descend des façades, s’estompe des papiers à lettre et des cartes de visite. On l’invoque encore parfois, on parle peut-être en son nom mais pas trop fort de peur de déplaire.
Ici un ibis la remplace, là c’est l’arbre de vie, ailleurs la balance de la justice ; pauvre Marianne.
Eh oui ma vieille, le e.cauchemar a déjà commencé ; mais comme aurait pu dire Descartes, un pavé reste un pavé… et un pavé lancé dans un écran, ça peut faire des dégâts : tant qu’il y aura des pavés, il y aura de l’espoir…
Arnaud Hote
Notaire à Bapaume (62)