Voilà plus d’un an maintenant, Arnaud MONTEBOURG s’en prenait aux professions réglementées et nous présentait comme des rentiers… Un an ! C’est long, un an ! Une révolution autour du soleil, et nous n’avons toujours pas réussi à commencer la nôtre ?

Pourtant, ça partait plutôt bien. Lorsque je repense à Sophie Yaigre, et à ce que nous avions appelé « l’appel de Créteil » je ne peux qu’éprouver un regret… Ce mouvement spontané aurait sans doute eu bien plus d’impact qu’une manifestation organisée, encadrée, Havassisée. Qu’on le veuille ou non, en acceptant d’attendre le bon vouloir du CSN, nous avons perdu en crédibilité… Du reste, les caricaturistes du petit journal avaient bien relevé le côté ridicule de notre insurrection douce ! « Je suis furibard ! », quel talent décidément ! En un mot (bientôt adopté jusqu’à en être totalement dévoyé), ils avaient déjà caractérisé ce qui allait suivre…

Furibards nous furibondions à l’envi

Furibards nous furibondions à l’envi, avec des mots d’une violence très notariale : « Un monde sans notaire c’est vous qui en faites les frais » , « Non Bercy « … Mon Dieu quand j’y repense, à la place du ministre, j’en aurai eu froid dans le dos ! Pas étonnant ensuite qu’il prenne un trait d’humour local pour une menace de mort, au milieu de ces volées d’injures-gentilles… Bref, tout le notariat était furibard, et attendait une progression dans l’opposition formelle au gouvernement, avec déclenchement progressif de mesures de rétorsions à l’encontre de nos « bourreaux ». Le Conseil Supérieur du Notariat allait mettre le feu, un à un à tous les étages de « la fusée » et tous imaginaient déjà un missile sol-sol s’élevant fièrement dans le ciel parisien… Mais ces artifices ont fait long feu, et nous avons tous eu la désagréable surprise de voir un Conseil Supérieur résigné faire part à tous et à chacun de sa « satisfaction » d’avoir évité le pire. Evité ? En est-on si sûr ?

Ce qui nous pend au nez !

La loi est promulguée, elle a monopolisé toute notre attention et nous avons oublié qu’elle n’était pas, loin s’en faut, la seule réforme prévue. La « Justice du XXIème siècle » et la réforme du droit des obligations ne sont pas moins « mortifères » que l’encombrante loi Macron. Le mélange des trois éléments pourrait bien signer la fin définitive de notre profession. A moins que…

Nous (la profession structurée unitariste) n’avons pas PU agir car nos instances et ceux qui ont pour principale activité de chanter leurs louanges tout en mettant des bâtons dans les roues des porteurs d’idées alternatives ont fait en sorte de rétablir le grand silence permettant de se taire d’une seule voix. Mais nous (les francs-tireurs qu’on désigne à la vindicte populaire furibarde pour éviter que leurs idées puisse être entendues, car il y aurait alors un risque que ces idées se révèlent pertinentes, et c’en serait terminé de la crédibilité des instances !) avons continué à le faire…

L’idée de péréquation, en germe depuis les années 60 (qu’on se le dise je n’en suis pas l’auteur, j’ai été convaincu par les précédents porteurs de l’idée, j’y ai apporté modestement ma contribution et d’autres l’ont grandement améliorée par leurs questions, leurs remises en question, leurs analyses contradictoires particulièrement au cours des dix derniers mois) est inscrite dans les termes même de la loi… Elle sera dont APPLIQUEE. Mais voyez-vous, en raison même des vociférations des furias, et de la volonté affichée du CSN de l’écarter sans même se la faire expliquer complètement par ceux qui y ont consacré une longue réflexion, celle qui nous sera appliquée, interprofessionnelle de surcroît, pourrait bien être désastreuse…

Si les instances persistent, pour des raisons strictement personnelles, à refuser toute présentation complète du système que nous proposons que doit-on en conclure ?

  • Qu’elles ont un meilleur système à proposer ? Je n’en ai vu aucune trace ni même l’évocation dans la communication institutionnelle ou furibarde !
  • Qu’elles ont une confiance aveugle en notre Gouvernement et en ses hauts fonctionnaires au point de préférer s’en remettre aux décisions de ces personnes plutôt que d’entendre une proposition venant de membres de la profession ? Sommes-nous donc des monstres ? Notez que l’idée ne me déplaît pas, un monstre c’est étymologiquement soit quelque chose d’exceptionnel, qui est digne d’être montré (monstranum), soit un présage divin (monstrum) !
  • Qu’elles ont choisi le côté « fric » et préparent un avenir radieux pour les plus riches ? Je crains fort que la vérité soit ici… On communique sur le futur « notariat à deux vitesses  » on ridiculise les « bébés macron », on annonce des dizaines de faillites et de licenciements et on fait une enquête bidon sur l’avenir de la profession, mais on ne prépare rien concernant le tarif !

Appel à l’UNION

Avoir des oreilles partout, ça permet d’être au cœur du sujet… L’expression que j’ai le plus entendue ces derniers temps (et je ne suis pas le seul!) c’est « Au sujet du tarif ils en sont au degré zéro ». Ne serait-ce pas faire insulte à tous ceux qui, avant moi et ceux qui osent encore se présenter parfois en ma compagnie (qu’ils en soient remerciés, ils se reconnaîtront !) ont défendu cette idée de péréquation… Ils l’ont fait :

  • dans les pages de Notariat 2000, bien-sûr, à commencer par Louis Reillier, son fondateur (qui a aujourd’hui atteint le statut de « légende » mais était déjà, de son vivant, un « monstre sacré »!).
  • au sein du Mouvement Jeune Notariat, notre frère-siamois détaché (Notariat 2000 s’appelait dans des temps lointains « Pompadour-Jeune Notariat »)
  • au Syndicat National des Notaires (je pense à un certain André Lapeyre et à bien d’autres, la liste serait trop longue pour les citer tous)
  • à l’Assemblée de Liaison (y compris lors de la dernière session ! Relisez le Journ’AL)

Une fois encore, ici même et maintenant, je lance un appel à l’union. Une fois encore, probablement, on m’accusera de vouloir briser l’unité. Mais « les pas-drôles s’envolent et les aigris restent » ;-) Si, comme on peut le craindre, le système tarifaire qui sera mis en place n’est pas suffisamment réfléchi et conduit à un désastre, nous saurons, vous saurez à qui vous le devrez ! On a les « nommélus » qu’on mérite !

Didier Mathy