Pour Didier MATHY, notaire à Sagy (71), « il n’existe pas une, mais des conceptions de l’archivage électronique ; aucune n’est fondamentalement bonne ou mauvaise, tout dépend de ce que l’utilisateur en attend et de ce que le concepteur a cru comprendre » (cf. site www.notairz.com). Explication…

 
« Parler d’archivage à un notaire, c’est avant tout lui parler des minutes, du fichier client et de la comptabilité. Mais est-ce là tout ? Certes, lorsque nous parlons « archives », les minutes sont au centre de nos préoccupations et, dans un souci permanent de préservation, mais aussi de souplesse structurelle, leur numérisation paraît essentielle. C’est sur ce point uniquement qu’une norme doit être choisie et mise en œuvre. J’irai même plus loin : cette méthode d’archivage gagnerait énormément à être unique, et même, une fois n’est pas coutume, imposée et gratuite !

Mais l’arbre peut, dit-on, cacher la forêt… Quelle est la forêt ? La gestion électronique de l’information. Quel est l’arbre ? L’archivage résumé à une  » momification  » ! Il est vain de conserver électroniquement ce que nous détenons déjà sous une autre forme exploitable, sauf à y trouver un  » supplément d’utilité « . Nos prestataires mettent en avant  » rapidité de recherche  » et  » facilité d’utilisation des documents numérisés « . Les « spécialistes » nous assènent des arguments irréfutables pour imposer à ces derniers des contraintes que personne, jamais, n’aurait évoquées pour leur source  » analogique « .

La photocopie a-t-elle toujours bénéficié d’une intégrité sans faille « dans tout son cycle de vie, de la création à la conservation » ? A-t-il fallu attendre l’heure de l’électronique pour que naissent les faussaires ? La préservation des minutes et de la preuve par l’électronique est essentielle, mais est-ce là tout ce que nous pouvons attendre de cette forme d’archivage ? L’effort inutile est, très vite, négligé ou abandonné. Si l’archivage se limite aux minutes et fiches bristol, qui pourrait y trouver de l’agrément ? Le minutier  » papier  » devenu nécropole, continuera à nous encombrer sans utilité, le minutier électronique nous apportant, certes dans de meilleures conditions…, ce que le minutier papier nous apportait. Faut-il renoncer ? Certes pas ! Mais veillons à ce que les outils additionnels qu’on nous imposera ne soient pas des galères où nous devrons ramer, après avoir payé le prix d’un billet première classe !

La profession s’est dotée d’une nouvelle entité baptisée du nom de la déesse grecque de la mémoire, est-ce un bon présage ? Peut-on espérer qu’elle ne réinvente pas l’eau tiède et essaye de réfléchir, enfin, à une meilleure utilisation notariale de l’informatique ? Nos détracteurs nous décrivent comme des  » pisse-ligne presse-boutons « , dont le  » monopole  » ne se justifie plus puisque  » tout est fait par l’informatique « . Il est plus que temps de prouver notre utilité par une approche radicalement nouvelle. Foin de  » cybernotaires « , je reste convaincu de la nécessité d’un  » supernotaire  » qui ne pourrait se contenter de vivre au milieu des momies !

Un proverbe africain dit  » un vieillard qui meurt, c’est une bibliothèque qui brûle « . Le notariat est un digne vieillard, qui aurait sans doute de belles années devant lui si son grand âge et sa discrétion ne plaidaient en sa défaveur. Nous ne manquons ni de compétences, ni de connaissances internes. S’en priver c’est retirer l’humus qui alimente les racines de notre futur ! Si nous oublions, nous devrons réapprendre, réinventer ! Or, nombreux sont les collaborateurs et notaires dont la retraite approche. N’est-il pas plus que temps de penser  » mémoire professionnelle  » ? L’obsession sécuritaire risque d’occulter l’intérêt véritable de la conservation de données tout aussi vitales que nos minutes et nos fichiers. Une mémoire infaillible reste inutile si les souvenirs ne reviennent pas à bon escient ! Les participants au Congrès UGNF de BEAUNE en 1999 savent déjà qu’il existe, au moins, un arbre, qui plutôt que de cacher la forêt la révèle et la met en valeur ! Trouverons-nous enfin les pépiniéristes qui aideront à son développement ? ».