Fondateur de l’Institut privé du viager (http://www.ipviager.com/), Michel Artaz s’intéresse, depuis maintenant 30 ans, à la gestion de patrimoine et à la rente viagère. Il a d’ailleurs été parmi les premiers à organiser, à Pompadour, les séminaires consacrés à la gestion de patrimoine. Selon lui, les notaires devraient s’intéresser davantage à la rente viagère immobilière et aux placements qui lui sont proches. Regard d’expert.

 

Notariat 2000 : Comment se porte le viager aujourd’hui ?

Michel Artaz : Plutôt bien du côté des vendeurs de plus en plus nombreux à s’y intéresser. La stagnation des retraites, la faible rentabilité des placements dits « sécurisés », l’augmentation des dépenses obligent, en effet, de nombreux retraités à céder un bien immobilier. Il s’agit souvent de leur résidence principale qu’ils continuent à occuper. Ils reçoivent alors un « bouquet » et une rente viagère indexée sur le coût de la vie. C’est un « plus » par rapport à de nombreuses retraites par répartition ou par capitalisation dont l’évolution est incertaine. En revanche, les acquéreurs se font plus rares. Ils hésitent souvent à s’engager dans une opération dont ils ignorent la date de dénouement. À la différence d’un remboursement de prêt bancaire, ils ne connaissent pas l’évolution de la rente viagère. Sans compter que les prétentions financières des vendeurs sont parfois excessives !

 

Notariat 2000 : Comment expliquez-vous cette « surévaluation » des biens à la vente ?

Michel Artaz : Essentiellement par le fait que les valeurs occupées et les taux de rentes sont calculés avec des barèmes complètement dépassés (barème Daubry par exemple). Les logiciels n’intègrent que quelques données, laissées à l’appréciation des utilisateurs. C’est pourquoi les résultats des calculs sont souvent disparates. Enfin, aujourd’hui, le viager est pratiqué par de multiples intervenants qui n’ont pas toujours les compétences financières, juridiques et fiscales nécessaires. Par tactique ou manque de connaissances, ils demandent souvent des sommes que les vendeurs n’obtiendront jamais, sauf à attendre plusieurs années ! Notariat 2000 : Que conseilleriez-vous aux notaires ? Michel Artaz : De communiquer davantage auprès des Français pour qu’ils les consultent préalablement pour toute vente en viager. En effet, les notaires interviennent souvent trop tard : à la préparation de l’acte de vente. Les vendeurs et acquéreurs sont déjà engagés par un mandat, par un compromis de vente dont leurs notaires n’ont pas eu connaissance.

 

Notariat 2000 : Le notariat devrait-il s’intéresser davantage à la rente viagère immobilière ?

Michel Artaz : Oui, car c’est la seule retraite qui nécessite l’intervention des notaires ! Tous les notaires de France n’étant pas spécialistes du viager, l’Institut privé du viager propose de les aider. Il a mis sur pied une formation qui aborde la rente viagère et d’autres activités qui lui sont proches : vente d’un bien occupé au comptant sans rente viagère, crédit vendeur, prêt viager hypothécaire, prêt hypothécaire cautionné, etc. Les notaires peuvent également faire appel à l’Institut pour qu’il intervienne. Je ne vous donnerai qu’un exemple de nos interventions : nos calculs avec différentes espérances de vie… Ils sont précis et s’opposent à l’opacité des pratiques actuelles. Nous considérons d’ailleurs qu’ils devraient être annexés à l’acte de vente, afin d’éviter d’éventuelles contestations soit par l’administration fiscale, soit par les vendeurs ou leurs ayants droits… phénomène qui se développe !

 

Pourquoi les calculs ressortant des barèmes et logiciels sont-ils critiquables ?

Ils ne tiennent pas compte :

• des différentes espérances de vie qui peuvent varier très sensiblement (INSEE, compagnies d’assurances pour les rentes viagères financières…).

• des caractéristiques du bien pour un viager occupé. En effet, pour des biens d’une même valeur (avec des superficies totalement différentes), les acquéreurs exigeront un taux de rendement interne prévisionnel (TRIP) net annuel totalement différent : il se situera entre 3,5 % / an (pour un bien très recherché) et 6 %/ an (pour un bien qui ne l’est pas).

• d’une prévision des charges annuelles que les acquéreurs auront à supporter.

• des taux d’intérêts pratiqués sur les emprunts bancaires classiques. Aujourd’hui, pour un viager libre, le taux d’intérêt pour le calcul du taux de la rente viagère ne devra pas dépasser 2 % / an (or un taux de 3,5 % est aujourd’hui souvent utilisé).