On nous assène, sans cesse, que nous sommes « en retard » et cet argument sert de base à toutes les errances, voire à toutes les réussites. Mais plus le temps passe et moins je comprends. Peut-être devrais-je demander ma mise sous tutelle ou, tout simplement, renoncer à comprendre, puisque réfléchir, c’est déjà désobéir…
Une phrase tourne en boucle dans ma radio mentale : « Si tous les autres allaient se jeter en Saône, les suivrais-tu ? ». Saône, Seine ou Garonne, la pertinence du propos ne vous aura sans doute pas échappé : le sens commun est-il le bon sens ? Toute la difficulté reste de savoir si le choix effectué par instinct grégaire sera nécessairement meilleur que celui que nous aurions pu faire individuellement. Prenons un exemple au hasard. Voyons… Disons « la Qualité », ou plus particulièrement la « démarche qualité ». Il est de bon ton, voire hautement démocratiquement « obligatoire », de s’engager dans la D.Q.N. (ne prononcez pas « des couennes » même si vous parlez l’Allemand, ça les vexe). Autrement dit, soit vous effectuez la démarche, soit vous n’êtes pas préoccupé de qualité et vous n’avez pas la « notariale attitude ».
L’outil ne fait pas l’ouvrier
Certes, si vous ne vous êtes jamais préoccupé de la qualité, la D.Q.N. tombe à point nommé. Mais si vous pensez que l’outil ne fait pas l’ouvrier – même s’il est difficile au meilleur ouvrier de travailler sans outils, que la relation avec votre clientèle et vos collaborateurs est un élément incontournable de votre qualité de vie, et si vous avez le malheur de pratiquer depuis longtemps la « recherche » de la qualité, la D.Q.N. imposée à grands coups de subventions ne devrait pas vous convaincre… Bien sûr, imposer et subventionner a toujours été une méthode en vogue chez nos « élus ». Mais lorsque je fais le bilan des opérations « suggérimposées », je constate qu’elles aboutissent généralement (télécopieurs mis à part) à encombrer nos étagères ou nos emplois du temps jusqu’à l’effondrement pitoyable du soufflé…
Certification + qualité ?
J’ai suivi, ces dernières années, trois stages d’information sur la démarche qualité, on ne pourra donc pas me dire que je n’ai fait aucun effort. Je pense avoir compris et pourtant, je ne ressens pas l’envie de m’engager. Plusieurs raisons à cela :
• Aucun des éléments apportés par ces formations ne m’était étranger, et tous étaient plus ou moins en application chez moi, avant même la formation ;
• Rien de ce qui nous est présenté ne justifie le coût (subventions mises à part) et l’investissement en temps (non subventionnable) de la DQN pour un office de la taille de celui dont j’ai la charge. Le rendement espéré serait minimal au regard de ce que nous pratiquons déjà.
• La plupart de mes (ex)partenaires certifiés ISO ne sont plus mes partenaires et ceux qui le sont encore sont en situation d’exclusivité, sinon je les aurais déjà quittés. Personne jamais n’a pu me démontrer que « certification=qualité », ni l’inverse, du reste
Bref, j’ai la très nette impression que certains d’entre nous, qui ont travaillé à améliorer en profondeur leur manière d’exercer notre métier, ont cru, en toute innocence, que LEUR conception était la bonne et que LEURS méthodes étaient les seules possibles. Grand bien LEUR fasse !
Conception d’un non-convaincu
Ma conception du sujet, c’est qu’il ne faut en avoir aucune ! Ce qui est bon pour l’un peut être mauvais pour l’autre. Tant que nous ne serons pas les succursales d’une entreprise unique dénommée Notariat (Dieu nous en préserve !), il appartient à chacun de déterminer seul, et à ses risques, le choix de son orientation. Qu’un notaire puisse être certifié ne me dérange pas, mais je ne suis pas convaincu qu’il soit nécessaire que nous suivions tous le mouvement. Pire, il est de notoriété publique qu’une telle démarche ne peut être entreprise qu’à condition d’être choisie, pas imposée. Or, on constate souvent que le recours à la « gratuité subventionnée » vide de tout sens ce qui en bénéficie. Lorsque la « démarche qualité » aura, à son tour, rejoint le cimetière des idées démodées, et qu’elle aura été remplacée par une autre, tout aussi bonne ou tout aussi mauvaise, soutenue par des « Grands Prêtres » soucieux d’assurer la rentabilité de leur doctrine en se parant des oripeaux de la « vertu », nous saurons réellement si cette idée était bonne. Dans l’attente, ce n’est qu’une idée parmi d’autres…