Bon nombre de notaires nagent en plein paradoxe lorsqu’il s’agit d’appliquer le principe « d’anticipation » à leur propre succession. Lorsqu’ils décident de passer la main, certains proposent, par exemple, à un candidat intéressé par cette perspective un poste de notaire salarié. La « période de fiançailles » permet ainsi confortablement de lever le pied tout en tenant en haleine son successeur. D’autres justifient le prix élevé de leur étude par un potentiel aussi extraordinaire qu’insoupçonné. Voilà qui donne le vertige ! Cette marge de progression, sorte de Graal virtuel que le cédant n’a pas exploité jusque-là, sera, c’est sûr, une source de revenus confortable pour le futur titulaire.
Mais les règles existent !
Dossier en ligne, moyennes, coefficients, contrôle par l’ANC et par le Conseil Régional… Mais qui sont ces gens qui se permettent de porter un jugement sur les prix de cessions ? Et c’est sans compter sur la crise qui se profile… Imaginons un instant que les candidats à l’acquisition se rebiffent, contestent les évaluations, formulent des contre-propositions en présentant des budgets prévisionnels tenant compte des perspectives économiques réellement peu engageantes. Que se passerait-il ? Le fait est que toutes les évaluations sont forcément fondées sur les moyennes des résultats obtenus. Donc plus la crise avance et, paradoxalement, plus les cessionnaires seront dans une situation « équitable ». C’est dire d’où nous venons ! De là à penser qu’il y a encore six mois, il aurait été bien plus confortable de céder… il n’y a qu’un pas. Et tout ceci fait incontestablement réfléchir. Peut-être qu’il va devenir de plus en plus difficile de gagner sur tous les tableaux et retirer un prix de cession élevé lors de la vente de son étude. Bien sûr, on m’objectera que tout cela est le produit d’une imagination fertile, voire perverse. J’anticipe la critique en répondant par avance que c’est bien la preuve que la politique de l’autruche a de beaux jours devant elle… Et je prends rendez-vous dans un an pour dresser un état des lieux objectif.