La bulle des valeurs mobilières des années 2000-2001 s’étant progressivement estompée, la bulle immobilière a progressivement pris le relais. Même si les origines sont différentes, le dégonflement de l’une n’est pas étranger au gonflement de la seconde. Bien sûr, il existe d’autres causes connues des professionnels : droits de mutation au plus bas, inflation importée d’Angleterre où les prix de l’immobilier sont déconnectés de la réalité (système des “mortgage transmissible”) (1), taux d’intérêt anormalement bas, allongement dramatique de la durée des prêts sur 30 ans…

Si l’on fait une comparaison avec la bulle mobilière des années 2000, les slogans sont différents : « les valeurs des sociétés, notamment des TNT, ne s’évaluent plus en fonction des bénéfices, mais des chiffres d’affaires ». Pour l’immobilier : « Les mensualités d’emprunt sont moins chères que les loyers », sauf que le loyer peut s’arrêter au bout d’un mois alors que le prêt implique une contrainte sur le long terme et n’est pas sensible aux aléas familiaux (chômage, divorce, etc.).

 

Cycles tous les 10 ans

La crise qui pointe à l’horizon n’est pas nouvelle et les cycles interviennent généralement au bout d’une dizaine d’années. Nous avons connu celle des années 1970, 1980 et 1992. Les deux premières se sont soldées sans dommage pour les particuliers. À l’époque les salaires augmentaient de 10 % par an, les prix et l’inflation suivaient le même rythme. Les seules victimes étaient les promoteurs ou les établissements financiers dont le principal d’entre eux, la Banque La Hénin, avait pour slogan : “Nous finançons tous vos projets, y compris les coups de foudre”. La suite est connue. Avec la crise de 1992, la circonstance aggravante est que même les biens de mauvaise qualité (appartements des années 70 situés dans les barres d’immeubles) ont vu leurs prix doubler. En parallèle, les charges afférentes à ces biens se sont accrues : hausse du chauffage, mise au norme des ascenseurs, etc. Du côté du législateur, la boulimie est de mise : après les termites, le plomb, l’amiante, le gaz, tout contribue à charger la barque de l’immobilier. Sans parler du nombre d’abonnés à l’ISF qui ne cesse d’augmenter, le syndrome de l’Ile de Ré ayant déjà gagné le continent.

 

Opérations sous-jacentes

Depuis 1992, l’immobilier enregistre une hausse de 100 %, alors que les revenus des salaires, des retraites ou des valeurs mobilières ne dépassent pas 25 %. La bulle qui est d’environ 50 %, ne demande qu’à éclater. Par ailleurs, l’immobilier souffre d’opérations sous-jacentes qui plombent son avenir. Voici 4 exemples : • Opération de défiscalisation : achat de terrain payé trop cher, construction dans des délais très courts (6 à 7 mois) ne respectant pas les délais de construction, aucune surveillance des futurs propriétaires encore inconnus, vente en produits financiers à de lointains acquéreurs dont les 9/10e ne se sont jamais déplacés et le tout acheté à crédit. En cas de vente due à des contingences familiales, la perte est d’environ 50%. • Opération qualifiée de marketing (technique mise au point par une banque parisienne) : lorsqu’un bien est invendable à Toulouse à 200 000 €, il est transformé en produit financier, vendu à Dunkerque à 240 000 € avec un prêt de 220 000 € et une garantie des loyers de 5 ans. • Terrain à bâtir acheté plus cher que la construction, l’ensemble étant difficilement revendable. • Surimposition de l’immobilier. Si l’on a présent à l’esprit l’impôt foncier et la taxe d’habitation, on oublie que ces impôts n’étant pas déductibles de l’IRPP, les redevables paient l’IRPP sur les sommes qui ont déjà supporté ces deux impôts. À cela s’ajoute l’ISF, ce qui revient à dire que l’immeuble est éventuellement taxé 4 fois.

 

Richesse artificielle

Tous ces éléments ont contribué à pousser le marché vers des sommets qui ont créé une richesse artificielle donnant le vertige. Les récentes déclarations du directeur de la BCE et du gouverneur de la Banque de France qui, en langage diplomatique, déclarent “surveiller le marché immobilier” montrent bien que l’inquiétude est réelle. Les surendettés de l’immobilier devraient venir grossir les victimes des crédits revolving et donner du grain à moudre à la Banque de France. En résumé, les professionnels attendent le “soft landing”, mais c’est bien le “crash landing” qui se profile à l’horizon.

 

(1) hypothèque