Horreur et indignation des lecteurs notariaux de L’Expansion de novembre (n°702) qui découvrent le bonnet d’âne de notre CRN, Caisse de retraite des notaires, classée 19e et dernière avec une rentabilité de 4,58%, la Caisse des sages-femmes emportant la palme de la 1ère place avec 47,96% !

Expliquer un tel écart n’entre pas dans notre propos. Notre Caisse est seule qualifiée pour ce faire. Cependant le battage amplificateur qui s’ensuivit mérite qu’on prenne un peu de recul… On imagine la succulente salivation du journaliste qui peut ainsi épingler le notariat, jusque dans sa retraite, alors que son péché le plus grave ne nous semble que véniel : une communication à moderniser. D’autant que dans la petite dizaine de pages, qui jouent le professionnalisme avec ses courbes et interviews, incontournables preuves de bien fondé, notre Caisse n’est évoquée que par la seule ligne infamante de notre classement. À noter que celui-ci ne se poursuit pas plus avant, alors qu’il existe, sans doute, bien d’autres Caisses ? Pourquoi s’arrêter à la 19e place et pas à la 20e ou à la 30e, sinon pour que l’opprobre suggérée saute bien aux yeux du lecteur. Décidemment, ces artifices journalistiques sévissent, même dans les titres les plus réputés ou considérés comme tels !

 

Choix et enjeux

Lieu commun que celui de faire dire aux chiffres tout et son contraire. Les esprits ne peuvent qu’être frappés de tels écarts. On nous dit aussi que la retraite est chose technique et complexe. Certes, certes ! Ne serait-ce pas pour brouiller les pistes et conduire le lecteur là où l’auteur entend l’amener sous couvert de chiffres, bien entendu sérieux ?… Mais enfin, en simplifiant à l’extrême, nous avons près de 8000 payeurs, un peu moins de la moitié de receveurs. Les premiers cotisent trop ; les seconds touchent trop peu. Évidence ! Au milieu, les réserves ! La clé du problème ne peut être que dans cette équation à trois bandes. La Caisse de retraite doit arbitrer et choisir, c’est son rôle et sa responsabilité. Rien ne permet de penser qu’elle n’y consacre pas le meilleur de son énergie et de ses compétences (1). La variation d’un seul pôle affecte nécessairement les deux autres. Par exemple, si l’on veut que les retraités touchent plus et donc augmenter ce fameux 4,58% qualifié de rentabilité (mais le terme est-il approprié ?) sans faire payer plus les actifs, on peut piocher dans les réserves ! Ou, au contraire, augmenter ces dernières, ce qui ne manquerait pas de plomber ces 4,58%…

 

Communiquer

Dans ce domaine du choix fondamental, nous quittons le terrain de la complexité dite technique, dont nous devons refuser l’asservissement, pour aborder le champ « politique ». Car tout choix est d’abord de cette nature. La question est de savoir s’il convient de communiquer à ce niveau et jusqu’où. Ainsi doit-on proclamer le chiffre des réserves au risque de susciter quelques envies ou commentaires ? On voit déjà quelques gorges chaudes prêtes à se régaler. Reste que la communication sur ce sujet de fond devrait être approfondie. Chacun est d’ailleurs prêt à convenir qu’un équilibre stable et pérenne d’une Caisse de retraite suppose de très importantes réserves. Ici le classement nous couronnerait d’or, sans doute ? Fut un temps, encore proche, où la Caisse, pour toute communication, éditait une élégante brochure abreuvée d’une ahurissante accumulation chiffrée, repoussoir absolu, malgré les propos apaisants qui les accompagnaient. En cela, voilà bien une tradition forte pour toutes les instances officielles, dont la Caisse fait partie. Gérer le silence n’est-il pas un réflexe éminemment notarial ? Reconnaissons une nette amélioration chez les unes et les autres sur la dernière décennie.

Partant de zéro, jusqu’où faudrait-il aller ? Vaste sujet qu’il serait intéressant d’aborder ! En attendant la Caisse aura gagné ses galons de communiquant lorsque le notaire n’enfourchera pas Pégase en se découvrant dernier, car elle aura su lui expliquer clairement pourquoi. Pas en termes de technique financière, mais simplement de choix, d’enjeu !

 

1 – Sur ce sujet, ma conviction a eu l’occasion de s’exprimer clairement. Lire article dans un précédent numéro de N2000. (Le Grand Défi, page 21, n° 444, décembre 2002).