Que demanderiez-vous au Père Noël du notariat si celui-ci existait ? À quelques jours de noël et à quelques semaines de la fin de leur mandat (1), c’est la question que nous avons posée à Élisabeth Couturon, Présidente de Notaires de France- Syndicat national des notaires et à Denis-Pierre Simon, Président du Mouvement Jeune Notariat. Regards croisés.
Notariat 2000 : Quels sont les faits et actions qui ont marqué votre présidence ?
Élisabeth Couturon : Lors de mes deux mandats, je me suis attachée à recrédibiliser la présence du Syndicat dans le paysage notarial en lui redonnant son rôle de défense de la profession. J’ai eu la chance de travailler avec une équipe soudée, structurée et motivée. Depuis 2008, nous avons dopé notre communication au travers, non seulement de notre revue Ventôse dont Philippe Glaudet est l’actuel rédacteur en chef, mais aussi avec de multiples actions dont notre congrès sur la performance à Avignon. Sur un plan plus politique, nous avons démontré, ces derniers mois, notre compétence et notre légitimité à défendre les intérêts collectifs de la profession. Lorsque le rapport Attali est sorti, nous avons transmis des propositions à la Chancellerie. Pour Darrois, nous avons été reçus par la Commission du même nom, et bien sûr, nous sommes présents dans le débat parlementaire. À ce titre, et compte tenu de notre représentativité, nous avons déposé des amendements soutenus par divers députés d’horizons politiques différents. Nous serons également présents au Sénat, les 8 et 9 décembre prochain, lors du vote du projet de loi sur l’acte d’avocat et les sociétés de participation financière. L’un des arguments avancés, en première lecture par ceux qui ont soutenu ce texte, a consisté à prétendre que le notariat était d’accord. Ce qui, nous le savons, n’est pas exact. Le Syndicat souhaite convaincre nos sénateurs qu’il reste opposé à ce projet. Enfin, début 2011, notre Syndicat devrait être déclaré par le ministère du Travail représentatif, c’est-à-dire qu’il deviendra cosignataire des conventions collectives avec le CSN. Nous nous en félicitons car nous sommes persuadés que le notariat a besoin d’un syndicat fort. Notre rôle et notre action sont complémentaires de ceux du CSN.
Denis-Pierre Simon : J’espère avoir convaincu par l’exemple les membres de Jeune Notariat. Je m’étais engagé à redonner au MJN le rang qui lui revenait, c’est-à-dire celui d’un mouvement professionnel fort, actif et influent. Il me semble avoir tenu mes promesses ! Je suis fier de notre site, des revues que nous avons fait paraître, des trois congrès pour lesquels je me suis battu aux côtés des équipes organisatrices… Concernant la profession dans son ensemble, je me suis appliqué à travailler pour le plus grand nombre : échanges avec les syndicats (de clercs ou de notaires), revue événement pour tous les membres du notariat, soutien des futurs clercs ou notaires, accueil des créateurs, opérations jeunes… J’ai également souhaité orienter le travail de JN vers l’international : la création du centre notarial européen, la participation aux travaux du CSN sur le titrement (jusqu’à Washington face aux Américains !), les entretiens PEARL pour les expatriés français. J’ai mis un point d’honneur à démontrer au CSN la richesse du creuset JN, à Maillot, à l’Université du notariat, à PNF, aux colloques internationaux, et aux congrès nationaux. Enfin, j’ai été très honoré que MJN soit convié, par les plus hautes instances de notre profession, à faire entendre sa voix et, lors des différentes crises, participe à la réflexion, en tant que membre représentatif de la profession.
Notariat 2000 : Comment avez-vous vécu ce mandat ?
Élisabeth Couturon : Avec conviction, énergie et détermination. Mon engagement est total. Je suis très fière d’être notaire car je crois à l’utilité sociale de notre profession en France et dans le monde.
Denis-Pierre Simon : Comme un militant de la profession ! Ces deux années m’ont beaucoup enrichi. J’en ressors avec une envie plus forte de me battre pour que nos concitoyens bénéficient de la protection des notaires et de l’acte authentique, mais aussi pour que les notaires s’impliquent davantage dans la construction de l’Europe et dans la lutte contre la pauvreté par le titrement.
Notariat 2000 : Quelle a été la tâche la plus ardue de votre présidence ?
Élisabeth Couturon : Faire comprendre au sein de la profession l’utilité d’une présence syndicale pour les enjeux futurs que nous devrons mener tous ensemble. La diversité n’est pas une faiblesse, mais au contraire une richesse. Je n’y suis pas totalement arrivée, mais je crois que l’idée commence à faire son chemin par la force des choses. Le dialogue social fait partie de notre monde actuel. Denis-Pierre Simon : Sans doute celle de faire débarrasser le couloir de JN de ses archives ! Les choses, comme les hommes, s’encroûtent si on ne veille pas à les faire bouger…
Notariat 2000 : Quels sont vos regrets ?
Élisabeth Couturon : De ne pas avoir eu assez de moyens, financiers et humains, pour faire plus ! Avec une seule permanente, nous faisons déjà des miracles, mais le Syndicat relève surtout du bénévolat…
Denis-Pierre Simon : De ne pas avoir été plus à l’écoute des autres et d’avoir mis parfois un peu trop le nez dans le guidon…
Notariat 2000 : Si le père Noël existait, que lui demanderiez-vous pour la profession ?
Élisabeth Couturon : Un pourcentage sur les cotisations professionnelles pour nous permettre d’amplifier le rôle syndical que nous devrions normalement avoir ! Je lui demanderais également une meilleure concertation avec le CSN. Nous devons travailler ensemble. Nous sommes heureux notamment de notre action commune en matière de médiation de conflits d’associés.
Denis-Pierre Simon : Du temps ! Pour que chacun de nous, notaire et collaborateur, puisse s’occuper de chaque client comme si c’était sa propre grand-mère qui achetait un appartement ou réglait une succession !
Notariat 2000 : Quels vœux formuleriez-vous pour votre successeur ?
Élisabeth Couturon : D’être toujours dans l’action et de ne jamais se décourager. Notre Syndicat existe depuis plus de 60 ans. Nos prédécesseurs ainsi que les administrateurs nous ont montré l’exemple du courage pour continuer quoiqu’il advienne !
Denis-Pierre Simon : Je laisse à mon successeur des comptes clairs et bénéficiaires, une situation sociale éclaircie, des événements ou actions à renouveler et deux chantiers : le forum de l’installation des notaires, et le réseau JN ! Ce n’est pas un secret : j’avais, dès mon élection, annoncé que je travaillerais pour un successeur bien précis (N.D.L.R. : Nicolas Nicolaïdes, 1er vice président). Il a été à mes côtés pendant toute ma présidence. Je souhaite pour JN qu’il soit élu et qu’il s’emploie à ce que le train que nous avons lancé accroche de nouveaux wagons sans faiblir. Ce serait un vrai bonheur de réussir ainsi ma sortie !
1. Le successeur de Denis-Pierre Simon sera élu fin janvier et celui d’Élisabeth Couturon courant mars. Les mandats sont de 2 ans. À l’heure où nous bouclons cette édition, aucun candidat ne s’est officiellement déclaré, même si certains sont pressentis…
Notre panel ne croit pas au Père Noël…
Le moral des notaires serait-il en berne ou serait-ce le manque de temps en cette veille 2011 ? Une chose est sûre : notre enquête « Et si le Père Noël existait ? » n’a pas fait un tabac ! À l’arrivée, l’esprit de Noël ne semble pas vraiment habiter la « planète Notariat », les notaires étant plus préoccupés par l’acte sous signature juridique et la fin de la crise immobilière. Alors, le Père Noël… À l’exception d’une poignée de doux rêveurs, notre panel ne s’attend pas à des miracles en 2011. « Je crains que l’année 2011 soit placée sous le signe du Père fouettard » nous confie un notaire de la Manche. C’est d’ailleurs l’avis de 70 % des notaires interrogés. Pour ce notaire des Bouches-du-Rhône, « si le Père Noël existe, c’est surtout avant les élections, déguisé en politicien. Après, nous dit-il, c’est le Père Fouettard… ». Plus optimiste, Me Jean-Pierre Cuillé (Gard) veut encore croire à la magie de Noël. À la question « quels cadeaux demandiez-vous au Père Noël ? », il répond toutefois : « plus de visibilité pour l’avenir et la possibilité de travailler plus sereinement ». Sa consœur de l’Eure demanderait plutôt « l’abrogation de la loi créant l’acte sous signature juridique ». Ici, on aimerait « plus de chiffre d’affaires et moins de charges » ; là, « un plus grand nombre de notaires, y compris notaires salariés », et « la promotion du vrai acte authentique ». De son côté, Sylvie Cames (Lot-et-Garonne) demanderait au Père Noël « la retraite à 55 ans pour les femmes et une augmentation du point car les salaires ont baissé en 2010, ce qui est une première en 36 ans de notariat ! ».