Ayant déjà eu la joie de vivre trois crises majeures du notariat (ce qui ne me rajeunit pas), j’ai constaté, à chaque fois, qu’il était d’autant plus difficile de résister à ces épisodes tragiques qu’ils suivaient généralement une période au cours de laquelle les cigales avaient chanté à tue tête, sans crainte du lendemain…

 

Rien de bien nouveau, me direz-vous, s’abreuver plus souvent à La Fontaine pourrait éviter bien des gueules de bois. Hélas, chaque cigale a sa fourmi, mais toutes ne peuvent pas se permettre de fermer leur porte en proférant une moralité de circonstances ! Hop ! Oublions un temps les musaraignes (qui s’en sortent, me semble-t-il, mieux que les dinosaures) et jetons un œil sur les humbles ouvrières de la fourmilière notariale.

 

Quand la bise est venue…

La bise est venue, le vermisseau se fait rare, et voici qu’on frappe à la porte ! Pas de doute, c’est encore une cigale qui crie “cotise” chez la fourmi sa voisine. La “fourminotaire” est une râleuse, c’est là son moindre défaut ! Individualiste, mais solidaire, elle paierait volontiers son écot ! Du reste, au temps chaud, elle le faisait, non sans maugréer… Et tous les “cigalorganismes” (Cigale SN, Cigale RN, Cigale DN, Cigale RIDON et tous ceux, plus fourbes encore, dont l’initiale n’est pas un « C »), en prenaient largement à leur aise, criant “cotise” à qui-mieux-mieux chaque jour qu’a créé le Bon Dieu ! Mais les temps ont changé. Faut-il vous rappeler la fable ? L’oisive, sûre de son utilité, frappe à la porte, mais se heurte à un refus dûment motivé : “Eh bien, chantez maintenant !”. Certes, les “fourminotaires” prêteront quelques grains pour subsister…Elles paieront même, si nécessaire, les parasites qui crient “cotise”, quitte à mettre leur propre équilibre en péril. Elles l’ont toujours fait. Le feront-elles toujours ? Car, contrairement à la fourmi de la fable, la “fourminotaire” n’est pas libre ! Aux beaux jours, la “cigalorganisme” consacre toute son imagination à créer des “pompacotises”, aux mauvais jours elle se contente de justifier leur existence et n’hésite pas à mandater à cet effet des “fourmissionnaires” chargés de slogans : “ça a le mérite d’exister et tous nos concurrents nous l’envient”, “ce mode de financement existe depuis plus de 40 ans et personne jamais ne l’a remis en cause”, “il faut le faire pour démontrer la cohésion de l’insectat”, “nous devons faire figure d’insecte valable auprès de la termitière et des insectats étrangers”… Ne faudrait-il pas profiter de la crise pour mettre fin à cette spirale qui, si elle ne nous tue pas cette fois, ne nous rendra certainement pas plus forts ?

 

“One fourmi, one for you”

Adoptons donc la technique du « one fourmi, one for you » ! C’est en effet au moment où nous connaissons une baisse des revenus qu’il est réellement facile de mettre en place un système beaucoup plus respectueux du cotisant et mettant enfin à égalité en cas de coup dur ceux qui profitent et ceux qui financent (à condition que le taux en soit fixé une fois pour toutes, chaque organisme ayant la responsabilité de sa gestion !). Toutes nos cotisations sont en effet assises sur les revenus passés. Chaque fois que l’idée de la retenue à la source est évoquée, les “questeurs” se rebiffent, ou pire proposent de cotiser double pour rattraper une année ! Imaginons un instant qu’à compter du 1er janvier prochain, chacun de nous verse mensuellement un pourcentage de ses revenus réels au taux appliqué en 2009 à chaque “cigalorganisme” pour alimenter les “pompacotises”… Puisque nous sommes plutôt “au fond” le montant des cotisations perçues pourrait difficilement être inférieur à celui qui serait acquitté sur la base des revenus 2008 ou 2009. Avec un peu de chance, il ne pourrait être que meilleur… Il serait, en tout cas, PRO-POR-TION-NÉ ! Sous cette forme, un “cadeau” d’une année de cotisations serait certes fait à chaque “fourminotaire”, mais en quoi cela serait-il une perte pour nos “pompacotises” ? Je ne vois aucune rupture dans la continuité des cotisations ! En cas de montées vertigineuses futures ou de plongeons incontrôlés, les cotisations seraient perçues au jour le jour sur les revenus réels de la “fourminotaire”… Plus d’effet “montagne russe”, moins de risques de mauvaises surprises… Bien sûr, le risque serait transféré au niveau des “cigalorganismes” elles-mêmes, mais après tout, aide-t-on vraiment les “fourminotaires” lorsqu’elles n’ont pas pensé à économiser durant les “beaux jours” ? Si une “cigalorganisme” vient, à l’avenir, crier “cotise”, nous pourrons enfin lui répondre aimablement, mais fermement “que faisiez-vous au temps chaud ?”