Entretien avec Pierre-Jean Meyssan

De la création d’un lotissement aux mesures à prendre pour le redressement d’un syndicat de copropriété en difficulté, de la division d’une vaste maison en appartements jusqu’à l’organisation juridique d’ensembles aussi vastes que la Défense à Paris, c’est un sujet « multidimensionnel » que l’équipe du Congrès national a exploré pendant deux ans. Un sujet qui a inspiré à Christian Lefebvre (Paris), Président de cette 103ème édition ainsi qu’à son équipe intellectuelle, pas moins de 18 propositions. À quelques heures du lever de rideau*, Pierre-Jean Meyssan (Bordeaux), Rapporteur général du Congrès, nous dévoile 8 d’entre elles… de la plus pragmatique à la plus audacieuse !

 

Notariat 2000 : Quelles sont vos « propositions phares » dans la première commission (« La division contrôlée du foncier ») ?

Pierre-Jean Meyssan : Celle qui consiste à figer la notion d’unité foncière. C’est une proposition pragmatique car c’est l’une des définitions de base du droit de l’urbanisme. Or, bien que fondamentale, la question de l’unité foncière n’a pas de réponse unique puisque, selon les particularités du cas, les solutions seront différentes et, parfois, les avis des autorités divergent. Cette proposition fait donc œuvre de consolidation. Autre mesure phare, celle relative à la notion de lotissement, qui mérite d’être clarifiée. Le lotissement est une opération importante, et nous ne comprenons pas certains changements imposés par la réforme. Il nous semble que le législateur s’est égaré sur le nombre de division de terrains. Nous souhaitons donc revenir à l’esprit de l’ancien système, tout en conservant certains points de la réforme (comme la notion de réalisation d’espaces communs).

 

Notariat 2000 : En traitant de « L’organisation conventionnelle de l’espace », vous entrez dans le domaine du contrat. Que vous a inspiré cet exercice difficile ?

Pierre-Jean Meyssan : Nos propositions règlent des choses précises. Ainsi, dans le droit fil de la réforme de 2005, nous sommes surpris de la manière dont le législateur gère le transfert du permis de construire. Il n’y a aucun statut, aucune règle du jeu. Comme le précise la deuxième commission, il a créé une voiture, mais pas de code de la route. D’où notre souhait qu’il revoit sa copie. La division en volumes fait également l’objet d’une proposition audacieuse. C’est un domaine né de la pratique notariale, dans lequel le législateur n’est jamais intervenu. Nous attendons aujourd’hui qu’il pose une balise – pas un statut- et admette que le volume immobilier est un immeuble par nature. La division en volumes, même si elle n’est pas réglementée, ne doit pas se placer en contradiction avec toutes les dispositions du Code de l’Urbanisme. Et de surcroît, elle doit assurer tant pendant la construction qu’au-delà une existence harmonieuse entre des entités très hétérogènes.

 

Notariat 2000 : Quelles pistes allez-vous explorer dans la 3ème commission (« La division de l’immeuble bâti ») ?

Pierre-Jean Meyssan : Nous ferons essentiellement des propositions de fond. L’une d’elles portera sur la question des normes de construction applicables à la division de l’immeuble bâti. Ainsi, le Code de la construction et de l’habitation impose 14m2 comme seuil minimal tandis qu’il est fait état de 9m2 pour un logement décent. Nous souhaitons uniformiser les deux seuils à 9m2. Plus politique est sans doute la proposition relative au statut de la copropriété. Nous estimons qu’il faudrait introduire plus de souplesse contractuelle dans certains types d’immeubles (locaux d’activités, immeubles à usage de bureaux, centres commerciaux) pour qu’ils puissent définir leurs propres modes de fonctionnement.

 

Notariat 2000 : Et dans la 4ème commission (« La vie de l’Immeuble divisé ») ?

Pierre-Jean Meyssan : Nous allons souligner les pathologies, sur lesquels chacun doit porter une attention particulière. Prenons l’exemple des petites copropriétés. Certaines se heurtent parfois à de gros soucis lorsqu’il n’y a pas de syndic de propriété. À côté des procédures judiciaires, nous souhaitons simplifier la procédure de nomination du syndic en permettant aux copropriétaires d’en choisir un en Assemblée générale. Une autre de nos propositions a trait aux « vieux cahiers des charges des lotissements ». Ces documents sont valables. Nous voulons qu’ils soient rendus public aux yeux de tous, de manière à mettre fin à la « prime aux fouineurs ».

 

* Cet entretien a été réalisé début septembre, avant la tenue du Congrès de Lyon. À l’heure où nous imprimons, nous ignorons donc quel sort les congressistes réserveront à ces propositions…