Nombreux sont les confrères qui, tout en me reprochant un goût immodéré pour le calembour (1), m’ont tôt ou tard présenté comme « notaire à Sagy », en rajoutant hilares : « paraît-il »… Conséquence directe de cette plaisanterie, je me suis pris de passion pour une figurine classique : les singes de la sagesse.

On prétend que le Mahatma Gandhi ne se séparait jamais d’une représentation des trois petits singes de la secte Tendai. Il avait fait sienne la devise de cette congrégation chinoise : « ne pas voir le mal, ne pas entendre le mal, ne pas dire le mal »… Cette posture aurait, dit-on, la vertu de protéger du mal. Nathuram Vinayak Godse l’ignorait sans doute lorsqu’il déchargea son arme sur le « Sage », visiblement pas immunisé par sa breloque. Il semblerait toutefois qu’une erreur de transcription ait faussé le sens initial de l’allégorie. Pire, ce symbole se trouve littéralement trahi lorsqu’il est utilisé – à votre libre choix – par le folklore maffieux en Sicile (« non
vedo, non sento, non parlo ») ou par certaines instances : « je ne vois pas autre chose que ce que me montre le CSN, je n’entends pas autre chose que ce que dit le CSN, je ne dis rien d’autre que ce que le CSN me demande de dire »…

 

Singes de la sagesse ?

En fait, les « singes de la sagesse » seraient des « singes de la facilité » : « je ne vois pas ce qui pourrait être nuisible, je n’en parle pas pour éviter les reproches, et je n’entends rien pour faire comme si j’ignorais tout ». Appliqué au notariat, cela donnerait par exemple : « je ne vois pas que les performances des abonnements R.E.AL les moins chers sont actuellement – de toute évidence – sabotées, je n’entends pas dire que Prélude sera supprimé, je ne dis surtout rien qui puisse inciter les notaires à regarder sur sociétés.com en se demandant pourquoi ils devront souscrire à l’offre supérieure ». Hein ? Mais non, je n’ai rien dit ! De quoi faire perdre tout leur intérêt à nos trois singes !

 

3 singes peuvent en cacher un autre…

Lors d’un séjour à Pékin, j’ai fait une terrible découverte. Dans une échoppe, devant moi, à côté de « bù jiàn », « bù wén » et « bù yán »(2), se tenait… euh, appelons-le, « bù yi » ! Eh oui, les trois singes sont quatre ! Le dernier est la conséquence des trois autres, de par son aptitude à suivre leurs préceptes. Il est l’archétype de la sagesse, le nec plus ultra de la quête du bonheur… Les mains sur les genoux, il ne fait absolument rien. Ça vous étonne ? Bouchez-vous soigneusement la bouche, les oreilles et les yeux, avec du matériel adéquat, bien sûr, car seule la déesse hindoue Kâlî pourrait le faire avec les mains ! Si vous réussissez à faire quelque chose dans cet état, merci de nous le faire savoir !

 

Révélation en 3 dimensions

Depuis ce jour, mon idéal est totalement différent et je cherche partout une représenSinges de l'à Sagytation, en trois dimensions, des trois singes de l' »à Sagy » : l’un équipé d’un mégaphone,  l’autre d’un amplificateur de sons, le troisième d’une paire de jumelles… Le sens serait : voyez tout et tirez-en le meilleur ; entendez tout et conservez en mémoire le meilleur ; dites sans retenue ce que vous avez vérifié. Et assumez, sereinement, cette attitude franche et responsable qui vous distingue radicalement de ce qu’un lapsus-clavis dont j’étais coutumier à mes débuts me conduisait à qualifier de « notaire soussingé ».

 

1 – Calembour qui me rapproche beaucoup plus de l' »os à moelle » que du Jurisclasseur Périodique, édition notariale.
2 – Pour les Japonais, Mizaru pour l’aveugle, Kikazaru pour le sourd et Iwazaru pour le muet… Le quatrième euh… ah non, celui qui a dit Lizarazu confond les matières, désolé !