Croyez-vous aux signes du destin ? Moi pas. Et pourtant… Il a suffi d’une brochure, « Le Notariat profession d’avenir », pour que le jeune notaire stagiaire que j’étais, décide d’embrasser définitivement la profession. C’est ce qu’on appelle « l’effet papillon ». Quelques années plus tard, la lecture des tout premiers numéros de votre revue favorite m’inspirait un drôle de rêve : créer l’association des amis de Notariat 2000. Et si maintenant nous passions à l’acte ?

 

Cette profession, mieux encore cette fonction, vous choisit plus qu’on ne la choisit. J’ai connu de nombreuses vocations qui ont fini ailleurs. Qui pourra réellement dire si l’acharnement de certains avocats contre notre « caste » n’est pas simplement motivé par le souvenir d’une petite phrase glissée « amicalement », du style « Tu n’es pas né dans cette profession, tu n’y entreras pas ». Nous en retrouvons souvent les auteurs dans les structures de la profession. Ce sont généralement eux qui vous conseillent de ne pas faire de vague, d’obéir, de ne pas prendre position pour éviter les ennuis. Les conséquences sont désastreuses. Probablement nous privent-ils de la diversité fabuleuse des potentiels qui sommeillent au sein de la profession… Il n’est de richesse que d’hommes (et de femmes, naturellement). Mais, cette richesse est sans intérêt si elle dort dans nos murs comme dans un coffre-fort, à l’abri des regards ! Bien sûr, « on » vous dira que nos « élites » dont personne (et surtout pas nous), ne mettra en doute la compétence, s’occupent de tout, et gèrent, dans votre intérêt, celui de la profession. Mais cela suffit-il ?

 

Indignez-vous !

Quelle différence y-a-t-il entre un notaire lambda et un notaire habilité à s’exprimer au nom et pour le compte de la profession ? Des années de respect scrupuleux des règles et de soutien aveugle à l’union de la profession conçue comme uniformité… Le conformisme, maladie contagieuse, a même fini par transformer les « fers de lance » du volontariat en « gentils petits toutous », prêts à faire les beaux à tout moment pour ne pas perdre leur su-sucre. Maître… Comment peut-on encore souhaiter se faire appeler “maître” lorsqu’on ne maîtrise plus rien ? Comment peut-on encore accepter que l’ingérence de l’institutionnel se porte au-delà de ce qui constitue l’essence de la profession et que tout soit dicté par des personnes qui n’ont finalement aucune légitimité à ce titre ? Bercés par les accents faussement modernes de la musique de chambre, nous n’entendons plus les échos des véritables musiques modernes. Alors, dans le secret des bureaux, les soupirs nostalgiques traduisent les douleurs refoulées… Où est passée la Conférence du Plan et ses joyeux bricoleurs d’utopie notariale ? Qu’est devenu Jeune Notariat ? À quoi ser(ven)t le(s) syndicat(s) (1) ?

 

L’avenir en ligne de mire

Faisons un rêve. Et si, du passé, nous faisions table rase (sans, pour autant vider les placards à archives, ni exterminer nos ainés survivants)… Et si, de l’avenir, nous faisions notre seul point de mire… Et si nous combattions l’uniformité par l’union ? Mais rêver ne mène nulle part. MLK, au fil des années, nous l’a bien fait comprendre ! À son réveil, le dormeur se trouve de nouveau confronté à la réalité. Alors, faisons de ce rêve une réalité tangible. Par l’addition de nos capacités individuelles, nous multiplierons notre potentiel global. Il n’est pas nécessaire de « couper tout ce qui dépasse ». Au contraire, même, les rameaux qui dépassent sont peut-être les prémices de branches solides et méritent toute notre attention. C’est impossible ? C’est sans doute aussi ce qu’ont entendu tous ceux qui, dans le passé, ont souhaité s’investir, et, au premier chef, le fondateur de cette revue, Louis Reillier. Mais, aurait dit Mark Twain, il ignorait que c’était impossible, et il l’a fait. Suivant son exemple, nous vous invitons aujourd’hui : « Vous dont la conception des choses est voisine de la nôtre, Vous qui approuvez notre doctrine corporative tendant à l’unité du notariat, dans le respect de la liberté pour chacun d’adhérer à tel groupement que bon lui semble, Vous qui approuvez les solutions que nous préconisons en vue de plus de justice et de plus de fraternité au sein du notariat, Vous qu’intéressent nos suggestions pour accroître l’utilité sociale du notariat, Vous qui, avec nous, êtes à la recherche d’un meilleur équilibre humain, d’une meilleure productivité de votre étude, Vous tous qui n’êtes pas des blasés, des « amortis », mais qui êtes avides de vous intéresser à des idées nouvelles, qui êtes partisans de la recherche d’un style nouveau dans le notariat » (2)… à venir grossir les rangs de… NOTAIRES DEMAIN !!!   1 – Ben oui, il semblerait qu’il y ait deux syndicats. 2 – Louis Reillier, Pompadour-Jeune Notariat, n° 29 mai 1958.