Ce 1er mai a été célébrée l’habituelle fête du travail, mais aussi superbement ignorée du notariat son éviction radicale du Conseil en assurance-vie, réservé aux inscrits au fameux Organisme pour le Registre des Intermittents en assurance-vie (ORIAS). Il s’agit de la transcription de la directive européenne du 9 décembre 2002, par la loi du 15 décembre 2006, entrée en vigueur le 1er mai 2007, sans tambour, ni trompette notariale !

 

La gravité d’une telle exclusion semble n’avoir ému aucune de nos instances, même pas l’INP ! Pourtant, tout notaire sait – ou devrait savoir- que, dans toute transmission successorale, l’assurance-vie constitue une pièce maîtresse très en amont. Cette prise de conscience et toute la formation mise en place, remontent aux années 80. Ce fut l’oeuvre de l’INP et de son Président Jacques Battut, après un lourd travail de concertation croisé avec le doyen Jean Aulagnier. Unofi était partie prenante. La complémentarité était évidente, permettant à tout notaire non spécialisé d’accéder à de bons produits et au conseil de cellules compétentes. Il allait de soi, alors, que la construction et l’évolution de la transmission du patrimoine de nos familles ne pouvaient ignorer le rouage essentiel de l’assurance-vie. Tous les aspects de sa mise en œuvre devaient être maîtrisés par le notaire pour qu’il puisse conserver sa clientèle familiale et ne soit pas réduit à authentifier les mutations immobilières.

 

Liberté du notaire

Comment a-t-on pu laisser passer ce déni de conseil sans se mobiliser avec des arguments solides à l’appui ? Couper le notaire du conseil, fut-ce en assurance-vie, est proprement suicidaire. Cela revient à renier notre branche libérale pour ne garder que celle d’officier public, ce qui peut nous conduire à être, un jour, soit fonctionnarisé, soit rattaché de gré ou de force à quelques grands cabinets d’avocats, nouveaux lawyers européens. Peut-être les Chinois seront-ils, dans ce futur, les nouveaux gardiens du temple que nous aurons déserté, en démantelant, activement ou passivement, ce qui fait notre spécificité : le service rendu et perçu en considération du client dans la globalité de sa vie patrimoniale. Quant à l’accès au produit, n’est-il pas dépendant du conseil ? Seule une totale hypocrisie peut soutenir le contraire. « Cachez ce sein que je ne saurais voir ». Le prochain recul programmé sera la négociation, pourquoi pas l’expertise ! Que nous restera-t-il hormis le décret de 55 avant la dissolution ? Sans doute, nous conserverons Unofi, prospère, pour délivrer le conseil et le produit. Où sera alors la liberté du notaire, celle que l’INP avait su préserver en complément d’Unofi ? Voie unique préjudiciable à notre image et à notre éthique, celle que nous ont laissé nos pères qui investissaient, sans crainte, l’ensemble de la sphère du patrimoine ! L’activité en était bien comprise de nos concitoyens.

 

Quel avenir ?

La période choisie pour cette amputation n’est pas anodine, les caisses sont pleines. Qu’importe l’avenir, celui de nos successeurs ! Foin des empêcheurs de ratisser en rond ! À Me Darmon du Groupe Monassier qui s’inquiétait auprès du CSN, il fut répondu que le problème ne se posait pas car l’activité était nulle… C’est ignorer les offices qui pratiquent dans le respect de la charte approuvée en AG du CSN, toujours en vigueur. C’est surtout afficher, avec désinvolture, le rabougrissement orchestré autour du monopole public. Traire la vache. Les praticiens qui se concertent n’ont trouvé que trois réponses : • arrêter l’activité et remettre les encours à un agent ORIAS avec les clients en prime ; • constituer une société commerciale ORIAS avec les risques que cela comporte ; • donner l’exclusivité à Unofi, conseil et fourniture compris. Sans doute est-ce bien ce que l’on veut ? Quel gâchis de temps, d’énergie, de compétence, et d’investissement pour élargir notre assise, donc notre pérennité ! Tristesse. Seul le service perçu par le client est important pour lui. Donc pour nous. Tourner le dos à cette évidence ne peut que déprécier notre statut, dont nous confions le sort aux caprices du prince.