Je lis le journal : « Tony Blair mis en cause dans le scandale des notes de frais » (je n’aime pas voir mise à mal une institution respectable) et je me souviens que je dois écrire un article pour N2000 car la rédaction me relance. J’hésite à commettre un nouveau « marronnier » sur la transparence nécessaire dans les structures notariales…
Je suis à la retraite, alors pourquoi écrire sur une profession qui ne m’intéresse plus qu’en qualité de rentier. « On ne peut pas être et avoir été », me dis-je, lâchement ! Et puis, j’ai en tête ce confrère en activité, rencontré récemment.
Tu n’as rien à me dire ? Il faut que j’écrive un article et je suis sec… » lui ai-je lâché.
Surtout n’écris pas, reste tranquille, jouis de ta retraite ! Le ton était moqueur, presque sarcastique. Il me renvoyait à l’inactivité, laissant entendre que j’en avais assez fait comme cela. J’ai essayé de trouver une excuse, un motif.
Tu sais, la rédaction me demande d’écrire… les retours sur mes articles ne sont pas mauvais !
Parce que tu crois qu’ils vont t’écrire pour te critiquer, te dire leur désaccord. Tu connais donc aussi mal le Notariat … après tant d’années ! J’étais un peu déstabilisé, d’autant plus qu’au fond, je n’étais pas sûr qu’un retraité ait bien son mot à dire… Je doutais, en somme. Je tentais d’obtenir une réponse plus éclairante.
Je t’ai gêné avec mes dialogues ?
Moi non, mais ton ex-associé, tes cessionnaires, certainement… J’étais muet et lui apparaissais dubitatif.
Enfin, tu sais bien comme cela fonctionne, les pressions… Tu as pensé aux conséquences dans le cas où ils auraient besoin des structures notariales ? a-t-il repris.
C’est tout de même loin tout ça. Je suis à la retraite depuis plus de deux ans !
Toutes ces critiques du Notariat… Tu n’en as pas marre ? De la part d’un ancien Président de Chambre, de Conseil Régional… » Sa réflexion m’est revenue comme une flèche. Tout était dit…
« Je n’aime que toi »
Le droit de critiquer serait-il interdit à un ancien Président, au motif connu « qu’on ne crache pas dans la soupe ». Je ne le pense pas, mais la majorité souscrit. Ai-je écrit des inexactitudes, posé des questions gênantes, irrévérencieuses, hors sujet ! ? Sans doute : obtenir directement du Président du CSN une modification de l’interprétation de la ligne K, contre l’avis du CR, cela ne plaît pas. Communiquer la vérité des chiffres sur les indemnités des élus comparés à l’absence d’indemnités pour les animateurs des Congrès qui abattent pourtant un travail considérable, ça ne passe pas. Critiquer la cérémonie de remise de médailles aux notaires assistants, ça coince vraiment. « Et pourtant, je n’aime que toi » comme le chante Aznavour. J’ai été heureux dans l’exercice de ma profession, car j’y ai trouvé un réel accomplissement et une justification à mon questionnement sur le sens de mon engagement.
La curiosité est-elle un vilain défaut ?
Mon regard revient sur le titre du journal concernant la déchéance des parlementaires anglais constituant la plus ancienne démocratie du monde moderne. Comment ont-ils pu tomber si bas ? Sans doute parce que la solidarité passive a joué à fond, ancrée sur l’hypocrisie, la cupidité ambiante. Il aurait été sain que l’un des leurs se lève et dénonce des habitudes pour le moins contestables s’agissant de parlementaires. Si cela avait été le cas, la Presse n’aurait pas révélé l’affaire et les parlementaires seraient, à présent, mieux respectés. De même, je n’accuse pas le notariat, ses élus, dans leur ensemble. Je m’étonne simplement que lorsqu’on pose des questions, lorsqu’on émet des doutes, lorsqu’on fait part de son désaccord, lorsqu’on demande d’avoir connaissance des comptes, une transparence minimum… l’on puisse se retrouver, à l’initiative d’une minorité, au banc des accusés.
C’était ma réflexion estivale. Espérons qu’elle inspirera les responsables de la profession et particulièrement les jeunes, fragilisés par la crise, ou les femmes souvent éprises d’idéaux.