Les 17e Rencontres Notariat Université se sont déroulées le 12 novembre dernier à Paris. Présidées par Jean-Pierre Ferrandes (Paris), ces rencontres ont rassemblé étudiants, notaires et universitaires pour débattre de thématiques fortes.

Les nouveaux actes

Pour Anne-Marie Leroyer, Professeur à l’Université Paris I et Benoît Nuytten (Roubaix), le notaire est « acteur des réformes », ce qui lui confère une responsabilité particulière. Les nouveaux textes accentuent et bonifient sa fonction d’auxiliaire de justice (réforme du divorce), mais aussi celle de praticien et créateur de pratiques (mandat à effet posthume, mandat de protection future…). C’est un « immense terrain de jeu » qui s’offre au notariat, mais saura-t-il relever les défis qui découlent de ces nouveaux actes (fichier des mandats de dispositions futures par exemple) ? Enfin, comme l’a rappelé le Professeur Michel Grimaldi, les récentes réformes qui mettent en lumière le notariat, ne doivent pas faire oublier qu’une ombre plane avec l’acte d’avocat…

 

L’acte authentique en Europe

À l’heure où la Chancellerie et le notariat réfléchissent à un projet d’acte authentique européen, Pierre Calle, Professeur à l’Université du Maine et Marc Cagniart (Paris) se sont interrogés sur la pertinence d’adopter un tel acte qui ne doit pas être confondu avec un acte authentique national pouvant circuler librement sur tout le territoire européen. L’acte authentique européen est un acte « uniforme, valable dans tous les états membres ». Pour le Professeur Calle, il ne fait aucun doute que cet acte serait un excellent vecteur de promotion de notre mode d’authenticité. Il occasionnerait également plus de sécurité juridique. Toutefois, à défaut de coopération, une certaine concurrence risque de s’instaurer entre les notaires des états membres. La création d’un tel acte conduirait également à la suppression de ce qui fait la spécificité des notaires français, à savoir la délégation de souveraineté française. Quels arguments resterait-il, alors, au notariat français pour s’opposer à la libéralisation du tarif ? Les Anglais accepteraient-ils ce type d’acte sans chercher à intégrer les sollicitors ? Et si tel est le cas, que resterait-il de ce qui fait l’essence même de l’acte notarié ?

 

Le tarif

Avec le tarif, c’est un sujet sensible qu’ont choisi de traiter Christian Benasse (Paris), Jean-Sylvestre Bergé, professeur à Paris X et Frédéric Hebert, secrétaire général du Conseil régional des Notaires de la Cour d’Appel de Grenoble. Pour les intervenants, le tarif échappe au jeu des règles européennes, mais cette ligne de défense ne suffit plus. Venu témoigner sur les effets de la libéralisation du tarif aux Pays-Bas, Me Aart Heering, notaire à Amsterdam, a expliqué que la réforme du tarif n’a pas été une « catastrophe » pour le notariat (des petits offices demeurent), même si elle a eu des « incidences sur son fonctionnement » en améliorant le service clientèle (1). Un témoignage qui n’a pas convaincu la salle, mais a créé le débat…

 

Le notaire salarié

« Le notaire salarié est un notaire à part entière, c’est vrai en matière de diplôme, de compétence, d’obligation et d’indépendance. Quant à la clientèle, c’est le notaire qu’elle voit, pas le salarié ». Tel est le message délivré par Gilles Bonnet, notaire salarié sur le point de s’associer avec le notaire titulaire de l’office dans lequel il travaille. Pourtant, le salariat ne fait pas recette : on compte seulement 5,7 % de notaires salariés sur tout le territoire (dont un peu plus de 8 % sur Paris). Pour Jean-Pierre Canales, Président de la Chambre des notaires de Paris, le statut de notaire salarié représente une opportunité pour le développement et l’ouverture de la profession, il permet de pallier le manque d’offices à pourvoir et de mettre en place une période de fiançailles en vue d’une future association. Si les choses sont claires dès le début (possibilité d’association future, rémunération, intéressement), ce statut est apte à répondre aux besoins de ceux qui veulent exercer le métier de notaire, en échappant aux conséquences financières liées à l’installation.

 

Perspectives et prospectives

Interrogé sur les perspectives et prospectives du notariat du XXIe siècle, Marc Guillaume, Secrétaire général du Conseil constitutionnel, ancien directeur des Affaires civiles et du Sceau, s’est voulu rassurant. La construction européenne n’a pas vocation à remettre en cause le notariat latin. Marc Guillaume a toutefois invité les notaires à ne pas s’éloigner de leur mission de service public (en acceptant tous les actes, y compris les moins rémunérateurs) et à régler la question de la pratique de l’activité de négociation immobilière, pour ne pas donner prise à ceux qui pourraient la contester (« Il vaut mieux parfois s’amputer plutôt que de laisser gangrener »)…

 

(1) Lire l’interview de Michiel Van Seggelen dans N2000 n°488, novembre.