Du 18 au 24 novembre dernier, Yvon Rose et son équipe de rapporteurs ont exploré les pistes d’un nouveau notariat. Un congrès MJN régénérant tant les idées émises par l’équipe -internationale- de rapporteurs en matière de droit et d’économie sont imaginatives et porteuses d’avenir.

12 heures d’avion, 9 heures de décalage horaire… Tout comme Ulysse, c’est un long voyage qu’ont fait les congressistes pour assister au 38e congrès MJN, qui avait pour thème « Droit et Économie ». À l’arrivée à San Francisco, un peu de fatigue, mais surtout un congrès de très bonne tenue qui valait le déplacement !

 

Sur le terrain

Les congressistes ont profité de leur présence en Californie pour découvrir les prestigieuses Universités de Stanford, Berkeley et Hastings et participer à un cours de droit, ce qui leur a permis de s’apercevoir que l’enseignement dispensé y est beaucoup plus « participatif » qu’en France ! Répartis par groupes (à la demande des cabinets), ils ont également visité des Cabinets de lawyers (Cabinet Jean-Yves Lendormy, Marie E. Galanti, Paul Tour-Sakissian…), l’occasion de créer des liens (nombreux sont les lawyers qui cherchent des correspondants français, notamment dans le domaine des successions) et de se familiariser avec le droit anglo-saxon, davantage axé sur les litiges. Un petit groupe a également pu se projeter « dans le futur », lors de la visite du Cabinet Heller Ehrman. Situé au cœur de la Silicon Valley, ce grand cabinet américain, qui a notamment pour clients Google et Microsoft, est à la pointe des NTIC (la visio-conférence est utilisée régulièrement depuis 2000). Les locaux, dotés d’un pressing, d’une salle de sport, d’une cafétéria, ont été pensés pour optimiser la qualité et l’investissement personnel des salariés (la durée de travail est de 40 h par semaine, avec seulement 2 semaines de vacances). Autre particularité : les Lawyers ont tous suivi une formation dans un autre secteur d’activité que le droit, ce qui leur confère une double culture. Enfin, comme beaucoup d’autres cabinets, le Cabinet Heller Ehrman dispose d’un service marketing spécialisé…

 

À l’écoute du congrès…

Christian Bernard, le Président du MJN, Yvon Rose et toute son équipe ont été reçus par M.Pierre-François Mourier, Consul général de France, très intéressé par les propositions du congrès, notamment par celle émise par Sabrina Hadida, qui porte sur le notaire exportateur de droit (cf. page 37). « Le Droit est aux avant-postes d’une bataille, a-t-il expliqué. Derrière la compétition entre deux conceptions du droit, il y a des enjeux culturels et même moraux. Votre Mouvement participe, par ses idées, à la défense de notre droit et à son avancée ». Quelques jours plus tôt, au Lycée français Lapérouse, les congressistes ont accordé des entretiens aux Français vivant à San Francisco. Une sorte de Maillot par-delà les océans…

 

Un pont vers demain…

« Ce congrès a pour mission de faire prendre conscience qu’il faut réagir vite et fort » ont martelé, à plusieurs reprises, Yvon Rose et son rapporteur général Denis Pierre Simon. Pour l’un comme pour l’autre, le notaire est un chef d’entreprise qui doit intégrer le marketing, développer la spécialisation dans les études, maîtriser le DIP pour exporter son activité et jouer un rôle plus actif en tant que conseil (on note une demande croissante des actes notariés dans les ambassades). Ce fil rouge a été déroulé tout au long des ateliers par l’équipe de rapporteurs (cf l’interview d’Y. Rose page 37 qui reprend les principales propositions du congrès).

 

Formation à l’étranger

Le Droit comme l’Economie agissent dans un contexte culturel. Pour Annie Rollet, il ne s’agit pas d’opposer la Common Law au système de droit latin, mais au contraire, de promouvoir la diversité des cultures. En matière de formation initiale, pourquoi ne pas prévoir qu’une partie du cursus de l’étudiant soit obligatoirement effectuée à l’étranger ? De nombreuses ambassades sont également intéressées pour accueillir des futurs notaires dans le cadre de leur stage… En retour, ne pourrait-on accueillir, dans nos universités, centres de formation professionnelle, voire offices notariaux, des étudiants, stagiaires et collaborateurs étrangers -tout particulièrement anglo-saxons- pour que les générations futures de professionnels étrangers soient imprégnées de notre culture ? Cette proposition « conquérante » a interpellé la salle et l’a convaincue de la nécessité d’ajouter, au cursus de formation, un comparatif entre les deux droits.

 

Et si le réveil sonnait ?

« Une profession qui n’épouse pas son siècle est une profession condamnée » écrivait notre fondateur Louis Reillier en 1956. À l’heure où les notariats de droit civil sont confrontés à la mondialisation économique et au projet de déréglementation, cette phrase a un sens particulier. L’accès à la profession et le tarif comptent parmi les principales critiques faites au notariat. Pour Gisela Shaw, Professeur d’études germaniques et européennes à Bristol, le notariat français a l’expérience, la compétence, les ressources organisationnelles et financières ainsi que le champ d’action statutaire nécessaire pour adopter une approche tournée vers l’avenir. Il doit, toutefois, prendre le temps de s’arrêter pour réfléchir attentivement à son devenir, car sa survie en dépend… La mise en place d’un tarif européen comptait parmi les principales propositions de Mme Shaw. Il s’en est suivi un débat « houleux » sur le tarif en France, certains prônant « la libération du tarif pour les actes n’imposant pas un passage obligé ».

 

Kaléidoscope notarial

« Il y a un défi pour nous, notaires français, la question de l’État. Mais que veut dire être notaire au-delà de nos différences et des notariats ? » s’interrogeait Bertrand Lacourte lors de son intervention (lire également p.181 du rapport). Exerce-t-on le même notariat lorsqu’on est notaire en Chine, en Pologne ou au Québec ? Jué Tang, Magdalena Arendt-Majewska, Marguerite Gollot, Danielle Beausoleil et Martine Lachance ont, chacun à leur façon, témoigné sur leur notariat et ses particularités. L’occasion pour Jué Tang, juriste à Shangaï, d’inviter les notaires français à s’intéresser davantage aux « domaines ouverts ». Toutefois, a-t-il précisé, « le notaire est un officier public, mais il ne doit pas oublier qu’il est juriste, sinon il se condamne ». De son côté, la québécoise Danielle Beausoleil a mis en garde ses confrères français : « une profession qui ne se régénère pas est une profession qui meurt à petit feu ». Le regroupement et la spécialisation permettent de se démarquer dans un monde de concurrence féroce. Le notaire doit être « l’expert », il doit être créatif et ne pas avoir peur de se spécialiser ! Enfin, comme l’a proposé Nicolas Nicolaïdes (Lexis-Nexis), le notaire doit mettre en place une véritable stratégie financière, marketing, produit (avec la DQN), managériale, mais aussi juridique et informatique. « Le notaire n’est plus seulement notaire, mais il est devenu, au fil du temps et de l’évolution de la société, un véritable chef d’entreprise »…

 

En forme • Le rapport du Congrès. Un vrai travail de prospection, enrichi par la contribution de nombreuses personnalités. Excellent ! • Toute l’équipe de rapporteurs. Bravo à Yvon Rose, Denis-Pierre Simon et Jean Pichat qui ont eu le talent de réunir des intervenants de tous bords (professeurs, notaires, collaborateurs, partenaires du notariat) et de tous horizons.

 

En Panne Le trop peu de congressistes aux commissions. Dommage.

 

En savoir plus… Retrouvez toutes les photos et la vidéo du congrès à partir du site notariat2000.com