Voilà deux mots qui semblent mutuellement s’exclure. La « réserve » est, chez nous, précédée du « devoir », pourtant banni du vocabulaire des générations post 68 ! Quant au mot « liberté », il s’accorde bien avec l’expression « le droit de parler, d’écrire »… C’est l’étendard du 21e siècle. Serions-nous les seuls, avec l’armée et le clergé, à être exclus de la liberté d’expression, sans limite ?

 

Inscrit dans nos règlements, le devoir de réserve est consubstantiel au notariat, et semble s’imposer au notaire, de façon quasi automatique. Mais alors, ne faudrait-il pas en vérifier le fondement, ne serait-ce que pour le justifier ? Ce devoir a pour socle la réputation de l’image notariale. À quoi nombre d’entre nous rétorquent que tout acte délictueux, voire indélicat, du notaire, nous revient comme un boomerang, ce qui est autrement plus dangereux que les simples « bavardages », fussent-ils tendancieux. Si les uns s’envolent, les autres demeurent par leurs préjudices qui encombrent nos Chambres et autres Conseils. Sans compter les parquets jusqu’aux tribunaux. Faire respecter les règles prudentielles et de rectitude morale est bien le premier des « devoirs » à imposer. En avons-nous réellement les moyens ? Au moins faudrait-il s’y efforcer…

 

Solidarité…

Constamment mise en avant, la solidarité limiterait le droit à la libre expression, toujours pour éviter de nuire à l’institution et à ses membres. Reste à examiner les limites de ce devoir qui devrait s’arrêter où finissent les préjudices. Entre nous, pas de devoir de réserve, sauf à éviter les trois « péchés de notre ancien catéchisme » : jugement téméraire, médisance et calomnie. Pas de réserve, non plus, à l’égard de nos structures. Depuis que la discipline a été transférée au Conseil régional, rien ne devrait empêcher d’informer librement nos Chambres, sauf à éviter, là aussi, les ragots et autres méchancetés inutiles…

Ne faut-il pas encore poser d’autres limites à « ce devoir de non dit », chaque fois que cette observance peut aboutir au contraire de sa justification ? Dans la hiérarchie de nos si nombreux « devoirs », l’intérêt général de nos concitoyens doit évidemment primer nos « réserves », quoiqu’il en coûte. Chacun a en mémoire telle situation inadmissible « couverte » par nos supérieurs. Il est pourtant du devoir suprême de les dénoncer car c’est le seul moyen d’y mettre un terme.

 

…et respect

Chaque notaire a le devoir personnel de « respecter » (ancien mot inusité) ses confrères et sa profession, en s’abstenant de critiques publiques, sauf si cette abstention couvre un agissement dangereux pour le notariat. Le libre arbitre personnel devrait être laissé à la responsabilité personnelle.