
L’eau et la soif
Christian Lefebvre, le nouveau président de la Chambre des notaires de Paris, ne manque pas d’idées novatrices. Ayant rappelé que le droit de l’entreprise dépendait traditionnellement du domaine notarial, il souhaite le réinvestir via l’acte authentique, en instaurant un « commissariat du droit ». Le but poursuivi serait de sécuriser la situation de la société en certifiant ses opérations juridiques. Le notaire y aurait, estime-t-il, toute sa légitimité. La démarche est séduisante, mais inattendue. Après un siècle d’abandons successifs, nous pourrions lui accorder peu de chance d’aboutir. Ce serait sans compter sur la force de frappe du notariat parisien, à la condition essentielle d’une mobilisation sans faille. Les atouts existent. La ferme volonté suivra-t-elle ? En attendant cet incertain lendemain, l’idée mérite un large coup de chapeau ! « Ne demande pas l’eau, mais seulement la soif » affirme le poète persan. Le notaire a-t-il réellement soif ? C’est toute la question du développement et de la diversification de nos activités…
Garde à vue
La réforme de la garde à vue inquiète policiers et procureurs, mais ravit les avocats qui l’ont obtenue via le Conseil constitutionnel. Elle devrait leur donner un abondant « grain à moudre » dans le domaine traditionnel du barreau et, par ricochet, satisfaire le notariat in petto. Bien plus occupés, les avocats devraient être moins enclins à lorgner sur l’assiette notariale… Le seul point à poursuivre sera la rémunération, majoritairement gratuite, donc assurée par les deniers publics du contribuable via l’assistance judiciaire. Les avocats en demandent la révision à la hausse. En cette période de gel de la dépense publique, le notariat est convié à mettre la main au gousset. Nous faisions jusqu’ici la sourde oreille. Ne serait-il pas opportun de réviser notre position ? Pour la suite, faisons confiance à la pugnacité de « nos amis » qui savent fort bien arriver à leur fin… Ils nous en administrent chaque jour la démonstration, en poursuivant malgré un échec provisoire, leur projet de « LA » grande profession judico-judiciaire. Peut-être devrions-nous suggérer la présence obligatoire d’un avocat pour soutenir les « victimes » ? On protège bien les voyous… L’occupation à temps plein de l’avocat nous laisserait alors un peu tranquilles ! L’espoir fait vivre.
Spécialisation : Platon, déjà adepte…
Bousculées par les évènements, nos structures ouvrent le goutte à goutte de la spécialisation, jusqu’ici sévèrement encadrée. Espérons que les résultats de ce débouclage viendront améliorer l’éventail des services à rendre à nos concitoyens. La spécialisation n’est pas tombée avec la dernière pluie. Elle s’est installée universellement dans nos sociétés occidentales, preuve évidente de son efficacité ! Platon déjà, dont la lecture était autrefois un incontournable de nos humanités, la justifiait avec la clarté de style qui le caractérise, notamment dans son « Dialogue de la République ». « La spécialisation permet de gagner en qualité. Elle est non seulement une nécessité, mais aussi un devoir visant à répartir les fonctions, les tâches au sein de la société. À l’inverse, la polyvalence qui contraint le perfectionnement, ne permet pas d’atteindre l’excellence ». Alors, si Platon le dit… Ah, si on l’avait su plus tôt !