La cuvée 2011 du congrès Jeune Notariat a proposé, sous la présidence d’Aliénor Guillaume (Thaon-Les-Vosges) et sous la houlette du rapporteur général Xavier Méchain (Nantes), une réflexion sur « les relations plurielles, la pluralité d’acteurs et le rôle du notaire ». Une thématique ambitieuse, peut-être un peu trop vaste, mais à l’arrivée un exercice juridique fouillé et un congrès riche en propositions d’avenir.

 

Audace, expérience et technicité. C’est en ces termes qu’on pourrait qualifier l’édition 2011 du congrès MJN. Avec une moyenne d’âge de 35 ans, l’équipe de rapporteurs a prouvé que le talent n’attend pas le nombre des années. En deux commissions rondement menées, fruits de 2 années de travail (comme au congrès national !), l’équipe a passé au crible le divorce (Nathalie Dugaud), les donations (Eric Lebrun), mais aussi le mandat de protection future (Mathieu Peron), le mandat posthume, le mandat successoral, les pactes d’associés (Guillaume Levêque), les « Family Buy Out », l’EIRL (Ludovic Arnaud) ou encore la fiducie, « mécanisme d’avenir sous exploité » selon le Professeur Tork (« C’est la bonne à tout faire »). Des outils « pluriels » qui, comme l’ont souligné les intervenants, bénéficient parfois d’un champ d’application un peu flou (comme le mandat de protection future) et qui auraient mérité que le législateur pense plus précisément ses réformes. Fortes de ses constats, les deux commissions ont su se frayer un chemin, avançant parfois dans les broussailles des nouveaux textes, proposant améliorations et pistes de réformes. En vrac, ont été notamment proposées la mise en place d’avantages « pacsimoniaux », la création d’un droit de la « divorcialité » avec l’adoption systématique de chartes entre magistrats, notaires et avocats (il en existe déjà à Bordeaux, Seine-et-Marne et Rennes), la création d’un privilège immobilier spécial de donataire en cas de délivrance à terme… A chaque fois, le rôle du notaire s’est avéré fondamental et certains éclairages ont permis la redécouverte de certaines pratiques. De quoi stimuler l’imagination des universitaires présents. Ainsi, le professeur Aulagnier a proposé, dans le cadre d’un mandat de protection future, la création d’un « fichier central des dispositions d’avant dernière volonté ». De son côté, le représentant du ministère de la justice aurait trouvé, dans la seconde commission (Economie et Affaires), animée par Guillaume Levêque – Ludovic Arnaud, matière à rebondir. A bon entendeur…

 

Un thème peut en cacher un autre…

« Relations plurielles, pluralités d’acteurs et rôle du notaire ». Ouf ! Incontestablement, cette thématique aura fait couler de l’encre : 496 pages, record battu pour le rapport qui égrène, au fil des pages, des propositions audacieuses (bravo à l’équipe de rapporteurs !). Mais le thème était-il « bien choisi » ? « C’est la pluralité des outils que toutes les interventions ont mis en évidence » a ainsi souligné, dans son rapport de synthèse, le professeur Stéphane Tork. Questions : N’est-ce pas davantage le rôle des congrès nationaux de mener un travail juridique aussi fouillé ? MJN ne doit-il pas conserver son statut « d’aiguillon » et examiner, comme ce fut le cas dans la plupart de ses congrès, l’exercice de la profession dans la pluralité de ses nombreuses facettes ?

 

La cerise sur le gâteau

C’est incontestablement l’excellente contribution de Xavier Méchain (Le notaire communicant, le notaire français et la pluralité linguistique,…) à la fin du rapport (l’intro n’est pas mal non plus). Outre le fait que c’est fort bien écrit (il a été prof de français dans une précédente vie !), on y découvre des propositions décoiffantes qui auraient mérité d’être présentées à Istanbul. « Nul d’entre nous ne peut se priver de (sa) lecture » a d’ailleurs souligné le professeur Aulagnier. À lire notamment, sans modération, la conclusion dans laquelle le rapporteur général propose de moderniser l’accès à la fonction de notaire en généralisant le concours. Vivifiant !

 

Le mariage du notariat et de l’université

Pas moins de 4 professeurs sont venus enrichir les débats au risque parfois de freiner les interventions de la salle, un tantinet intimidée par leurs joutes verbales. Dans la première commission, Jean Aulagnier, pape de la GP et créateur du célèbre DES de Clermont-Ferrand, et Raymond Le Guidec, véritable chantre du notariat (il a fait « soutenir » près de 1 000 notaires), ont épaulé Matthieu Perron, Eric Lebrun et Nathalie Dugaud (« Famille et patrimoine »). Dans la deuxième commission (Economie et affaires), Mustapha Mekki, professeur à Paris XIII, était assis aux côtés de Ludovic Arnaud et Guillaume Levêque. Dans son exposé sur le patrimoine, il a rappelé que « les bonnes intentions ne font pas (toujours) les bonnes lois » et que le « mille-feuilles législatif » est quelquefois « difficile à digérer » ! Enfin, Stéphane Tork, Professeur à l’Université Panthéon Assas, spécialiste en droit financier et droit européen des affaires, était chargé du rapport de synthèse.

 

Congrès 2012…

Il se tiendra à Grenade (Espagne) du 17 au 21 octobre 2012 et aura pour thème : « Publicité foncière et notariat : quel avenir ? ». Il sera présidé par Madeleine Gruzon (Mitry-Mory, Seine-et-Marne). Yves Lotrous en sera le rapporteur général et André Voide le commissaire général.

 

Interview express… du rapporteur général

Un congrès, c’est un moment fort en émotions avant, pendant… mais aussi lorsque le rideau tombe. Impressions de congrès de Xavier Méchain (Nantes), le rapporteur général.

Notariat 2000 : Ce congrès a-t-il répondu a vos attentes ?

Xavier Méchain : Oui, pleinement. Beaucoup de rencontres et de débats stimulants ont pu avoir lieu. Ce fut aussi une belle aventure humaine, et je pense que certains rapporteurs se remettront au service de la profession…

 

Notariat 2000 : Si vous deviez retenir une proposition, quelle serait-elle ? 

Xavier Méchain : Plus qu’une proposition isolée, c’est l’esprit général qui a soufflé sur le Congrès que je voudrais retenir : résistance des notaires présents à la pensée unique et au repli sur soi, audace et confiance pour s’approprier les nouveaux outils juridiques offerts aux praticiens ces dernières années (nouveaux mandats, fiducie, EIRL etc).

 

Notariat 2000 : Quel a été le point fort du congrès ?

Xavier Méchain : L’humanisme et le pluralisme cultivés par l’équipe, ainsi que le dialogue, de très grande qualité, de nos jeunes rapporteurs avec les universitaires qui nous avaient rejoints. Ces derniers nous ont encouragé, ainsi que la profession, à manifester toujours plus de créativité rédactionnelle pour s’adapter aux besoins des clients.

 

Notariat 2000 : Avez-vous un regret ?

Xavier Méchain : Nous aurions aimé échanger beaucoup plus avec le notariat turc. Le temps a manqué car nos travaux avaient déjà mobilisé toutes nos énergies