Par Valérie Ayala, Aline Boyer
Gros plan sur la planète notariat et les préoccupations des notaires en 2008. La suite de l’enquête paraîtra dans notre numéro de juin-juillet (N2000 n°494)
La remise en cause du quasi-monopole d’accès à la publicité foncière
Le notariat serait-il plus optimiste au fil des années ? En 2008, une courte majorité (53% contre 70% en 2002) prédit, généralement à moyen terme, une remise en cause du quasi-monopole d’accès à la publicité foncière. Pour François Messineo (Loire-Atlantique), la meilleure des parades consiste à encadrer l’accès à la publicité foncière, faute de quoi, écrit-il, « nous verrons un afflux de soi-disants juristes qui feront n’importe quoi ». La fin de ce quasi-monopole aurait pour conséquence, comme l’écrit Lionel Bihin (Ardennes) « la disparition du notariat ». « Le métier de notaire ne serait qu’une spécialité dans la grande profession du droit unique » nous dit également son confrère de la Manche. Claude Rauscher (Vosges) et Philippe Maitrot (Somme) sont plus réservés. Le premier admet que « le gâteau peut faire des envieux », mais mise sur les « très petites transactions » (« que personne ne voudrait faire » dit-il), pour protéger encore un peu le notariat. Pour Philippe Maitrot, cette remise en cause est « peu vraisemblable ». « Le Trésor public ne confiera pas le rôle de perception à n’importe qui », estime-t-il. « Il y a trop de risques ». Enfin, pour Michel Vogelweith (Vosges), ce scénario catastrophe ne se produira pas « si tous les notaires jouent le jeu de Télé@ctes ».
La liberté d’installation
Comme en 2002 et en 2006, la liberté d’installation ne fait pas recette. 72% des notaires interrogés s’y opposent, souvent pour « ne pas fragiliser le maillage ». « Si l’on veut que la profession perdure, il y a lieu de veiller au respect du maillage et à la qualité des praticiens » écrit Olivier Gallot-Le-Grand (Loire-Atlantique). Jean-Claude Morana (Yonne) et Jean-Christophe Hemery (Pas-de-Calais) craignent une désertification des zones rurales, comme cela s’est passé pour les médecins. Un avis partagé par Frédéric Tatat (Yonne) qui remarque que, très souvent, les nouveaux notaires rechignent à s’installer à la campagne. Jean Deruaz (Haute-Savoie) craint, quant à lui, que cela « engendre des difficultés pour certaines créations car ce sont souvent de petites structures ». Pour 28% de notre panel, l’ouverture est une bonne chose, même si certains y vont de leurs conditions. Ainsi, Jean-Pierre Bossé (Vienne) souhaite qu’un contrôle soit maintenu dans l’intérêt du service public. Pour d’autres, comme Isabelle Guerrault (Ille-et-Vilaine), c’est un bon moyen de mettre fin à des rentes de situation totalement anormales. Mais, pour la plupart des adeptes de la liberté d’installation, c’est la condition sine qua non au développement de la profession. « Le numerus clausus ne correspond plus à l’époque actuelle, la liberté d’installation permettrait de donner un service rapide et de qualité aux clients » écrit Gilles Saleur (Savoie). « On ne gagne pas une guerre en restant au fond des tranchées, accroché à sa couverture » rebondit Christiane Schoepff (Nice) tandis que Jacques Vautier (Indre-et-Loire), souhaite qu’on facilite les fusions, les nominations de notaires non associés, et même qu’on accueille d’autres professionnels dans la profession. À noter : La nécessité d’augmenter le nombre des notaires est admise par tous. Plusieurs notaires jugent souhaitable de faciliter l’accès à la profession aux notaires salariés. Pour quelques-uns, « la sélection basée sur l’argent est une aberration ». C’est notamment l’avis de Romain Lecordier (Manche) qui verrait d’un assez bon œil que la profession aide des jeunes, doués, mais désargentés, à s’installer, en leur octroyant, par exemple, des prêts sans intérêt…
La simplification du tarif ?
Bien qu’il soit majoritairement considéré comme « peu lisible pour les clients », « trop compliqué » et « source de contentieux (article 4) », le tarif est « en meilleure place » qu’en 2002 et 2006. « Les grands principes de proportionnalité ou de fixité sont tout à fait adaptés » lit-on notamment. Les 63% de notaires qui appellent de leurs vœux une simplification du tarif ne manquent pas d’arguments. Pour Régis Huber (Yvelines), « c’est tout le tableau II qui est difficilement compréhensible par les clients ». Dans les Vosges, un notaire aimerait que soit créée une Caisse de compensation pour que les petits actes soient payés pour le travail qu’ils occasionnent ou encore que l’on dispense de charges les études installées en milieu rural défavorisé, donc tous les TPO. Monique Thoquenne (Somme) note qu’il n’y a pas de formalités communes à tous les actes, elle jugerait opportun de les intégrer dans les émoluments en augmentant ces derniers d’autant. Enfin, François Rames (Aveyron) relève des disparités importantes d’une étude à une autre en matière de tarif.
Les nouvelles technologies ?
L’approche notariale des nouvelles technologies (Real, Télé@ctes, signature authentique et électronique…) est jugée efficace par 70% de notre panel. « Cela prouve la faculté d’adaptation et le modernisme de la profession » écrit Patrick Leplat (Alpes-Maritimes). L’indice de satisfaction est donc bon, même si certains estiment qu’il va falloir encore un peu de temps pour que tout fonctionne correctement. C’est notamment le cas pour Télé@ctes. « Il faut nécessairement du temps pour cette révolution » écrit Charles-Henri Delahaye (Savoie). Certains, comme Philippe Maitrot (Somme), regrettent que beaucoup de leurs confrères n’utilisent pas l’ordinateur. Laurent Bernard (Loiret) prend l’exemple de l’email, « pourtant très simple d’utilisation qui est utilisé par seulement 10% des notaires ». « C’est nécessaire, mais il ne faut pas trop nous en demander d’un seul coup », écrit Guy Veniere (Vendée)…