Lorsque je rencontre des amis confrères (il y en a) et que je leur pose la rituelle question « Comment ça va ? », tous répondent invariablement par un « ça va ». Si je m’arrête à cette première écoute, je me dis que tout va bien, d’ailleurs pourquoi cela n’irait-il pas ? Pourtant, c’est souvent un « ça peut aller », voire un »ça pourrait aller mieux »qu’il faut entendre, quand ce n’est pas un « ça ne va pas du tout » (mais ça, ça ne se dit pas…) ou, pour les plus âgés, « vivement la retraite ». Ces derniers le pensent quelquefois si fort qu’on peut se demander si le bonheur n’est pas dans « l’après notariat »…

 

Clients difficiles, trop de dossiers qui ne sortent pas, trop de fatigue et de stress, trop de solitude dans l’exercice de son métier, trop de responsabilité, trop de ceci ou trop de cela (mais jamais trop de bonheur !), autant de choses qui favorisent le « blues du notaire ». Et pourtant, on nous rabâche – et on se le répète comme pour s’en convaincre- que nous faisons « le plus beau métier du monde ». C’est vrai en théorie, mais en pratique ? Ne nous leurrons pas : il ne faut pas chercher le bonheur dans le déroulement parfaitement huilé d’une vie professionnelle sans défaut. Les clients difficiles, il y en aura toujours, ils seront même de plus en plus exigeants et si nous ne les satisfaisons pas, nous n’en aurons plus. Or, le bonheur ne se trouve pas dans le chômage. Les problèmes de dossiers compliqués, de gestion du personnel, de responsabilité et de stress, nous les aurons également, et de plus en plus. Nous ne pourrons pas les changer, même si nous pouvons faire des efforts pour mieux les régler (vive la qualité…). La seule chose que nous pouvons changer, c’est notre façon de vivre ces événements « douloureux ». Pour cela, il faut travailler sur nous-mêmes.

 

« Zen attitude »

Pour aller mieux, il faut déjà croire que c’est possible. Une fois cette prise de conscience effectuée, il faut accepter de se faire aider. J’en entends déjà certains me rétorquer que la séance chez le « psy » ou le stage de méditation dans une communauté du Larzac, c’est pas pour eux. Qu’ils se rassurent : loin de moi l’idée de les y envoyer (quoique certains relèvent purement du psy à mon avis…). Il existe des tas de moyens pour qui sait les chercher, car ni l’INAFON ni l’Université du Notariat ne dispensent de stages de gestion du stress, de relaxation ou de toute autre méthode destinée à nous faire aller mieux. Dommage ! Les entreprises l’ont d’ailleurs bien compris : les « masseurs-express-assis » ont des carnets qui ne désemplissent pas, des cours de relaxation y ont lieu, le « coaching » se voit pratiqué par tous les managers, les centres de thalassothérapie fleurissent et se multiplient, les comités d’entreprise organisent à tour de bras des cures « anti-stress ». Et nous, où en sommes-nous ? Bien que très en retard par rapport à d’autres professions, nous avons pris conscience du bonheur de nos collaborateurs (même s’il reste encore beaucoup à faire !). Alors, qu’attendons-nous pour nous occuper un peu de notre propre bonheur et affronter notre vie professionnelle avec plus de sérénité ? « D’avoir du temps », me direz-vous dans une dernière réticence. Certes. Mais, justement, ce temps ne nous manque-t-il pas parce que nous en prenons plus à gérer des problèmes que nous règlerions plus rapidement si nous allions mieux ? Comment être efficace si on n’est pas en forme ? Comment affronter et régler un problème si on n’est pas armé pour le régler ? Il faut savoir quelquefois lever la tête du guidon et perdre un peu de temps pour pouvoir en gagner ensuite. Nous aurons notre retraite pour nous reposer, en attendant, nous pouvons croire que le bonheur n’est pas dans l’après…