En août dernier (1), Le Canard Enchaîné publiait un article intitulé « Fillon vacancier honteux ». L’hebdomadaire y épinglait notre Premier ministre qui avait signé et validé un Décret (2) alors qu’il se trouvait en villégiature en Italie. D’où l’absence -relevée- de localisation de la signature dudit Décret. Omission inutile, précisait Le Canard, aucune disposition légale n’interdisant au Premier ministre, au président de la République et aux membres du gouvernement, d’apposer leur signature en dehors du territoire national. Est-ce le cas pour les notaires ?

 

Bien que nous ayons une compétence nationale (3), nous avons un pouvoir géographiquement limité au territoire de la nation. Notre garde des Sceaux a certes la possibilité de signer en dehors du territoire, mais ne nous a pas délégué cette faculté. Oubliée donc pour le notaire la possibilité d’authentifier un acte pendant ses vacances en Toscane : la délégation de la puissance publique ne le prévoit pas.

 

Sous le soleil

Le notaire peut-il alors signer un acte s’il est en vacances en France ? En théorie, oui ! Un clerc, valablement habilité, peut avoir recueilli les signatures des parties, puis transmettre l’acte ainsi signé au notaire qui le signera à son tour. Il se peut que l’acte comporte comme mention finale : « Et le notaire a signé le même jour… ». Cette mention est d’une importance fondamentale car c’est la signature du notaire qui donne à l’acte sa date certaine, authentique, faisant foi jusqu’à inscription de faux. Dès lors, si le notaire n’est pas sur place, il est nécessaire de lui apporter l’acte à son endroit pour qu’il le signe le même jour. Par porteur, en TGV ou en avion. Ou de le substituer. Sinon, l’acte doit comporter une autre date, celle du jour de la signature par le notaire, et les virements comptables effectués au plus tôt à cette dernière date… ainsi que le chèque de délivrance du prix. Un prix qui ne saurait évidemment être versé au vendeur si l’acte n’est pas signé, authentifié par le notaire. C’est une difficulté bien connue des notaires individuels qui, parfois, se déplacent, sont malades ou en vacances, donc ailleurs que dans leur étude. S’ils ne reçoivent pas la signature des parties, ils signent toujours le même jour. C’est écrit dans l’acte…

 

Comme Cendrillon

Signer un autre jour en conservant la date initiale constituerait un vulgaire faux en écriture publique, un crime passible des assises. Aucun notaire ne s’y risquerait. Aucun notaire ne « passe » le vendredi à signer tous les actes de la semaine, reçus par les clercs habilités ! C’est évident ! Le notaire signe le même jour, en son étude. D’ailleurs, s’il est revenu de déplacement, les notes de péage, les billets de TGV et d’avion le prouvent. Il y a même des témoins de l’impossibilité d’ubiquité. Ainsi, les « fausses minutes » n’existent pas. Il n’existe que des actes arrêtés et signés le jour même par le notaire ! Cela ne va pas sans difficulté. Surtout pour un notaire individuel qui ne peut être partout à la fois. Grâce à la signature électronique notariée qui vient d’être validée le 20 août 2007, le notaire va bientôt pouvoir signer un acte à distance et respecter la date authentique, sans être tenu, comme Cendrillon, de rentrer à l’étude avant minuit. Décidément, on n’arrête pas le progrès…

 

1. N° 4529 du 15 août 2007. 2. Décret du 7 août 2007, n° 2007-1197 3. À l’exception de la règle inutile, désuète et bientôt supprimée relative aux actes dits « répétitifs ».