La vie en SCP relève, par certains aspects, de l’exercice difficile de l’équilibriste ou, plus exactement, de l’alchimie du couple. En effet, deux associés trouvent souvent plus d’occasions de se rencontrer dans une journée que deux époux…
Les notaires s’associent la plupart du temps dans le cadre d’un contrat de SCP. Un peu comme un couple marié dans le cadre d’un contrat civil. Du coup, les notaires se trouvent confrontés pratiquement aux difficultés de la vie à deux – ou à plusieurs -. Les différends ont toutes sortes d’origines : une différence d’âge, de formation, d’éducation, de caractère, de philosophie … Les causes de mésententes sont aussi multiples que celles qui président au divorce et il n’y a pas de remèdes miracles ou de recettes magiques.
Faudrait-il dans ces conditions ressortir les recettes du temps passé :
• choisir un associé en fonction de critères raisonnables basés sur la connaissance que l’on a l’un de l’autre antérieurement à l’association ;
• partager les mêmes valeurs ;
• avoir une éducation semblable ;
• poursuivre le même but et le même idéal…
Cette solution ne répond malheureusement plus aux conditions actuelles car parvenir au statut de notaire est devenu pour le candidat un véritable parcours du combattant. La voie pour le diplômé est une voie étroite, semée d’embûches, utilisant tous les moyens pour le décourager ou le rejeter. La recherche d’un associé se fait dans une confidentialité de mauvais aloi. Les Présidents sermonnent, le CSN promet, la Chancellerie subit, la base entend, mais ne constate pas une organisation claire, transparente et efficace, susceptible d’aider et développer les transmissions d’offices dans de bonnes conditions.
Cursus du futur notaire
Au vu de ces difficultés de formation, puis de nomination, réelles et ardues, il ne reste qu’à envisager le renouveau, l’adoption de nouvelles règles pour faciliter le cursus du futur notaire. Pourquoi ne pas adopter, comme certains avocats le souhaitent, un « tronc commun » pour la formation des juges, des avocats et des notaires ? Les étudiants choisiraient « in fine ». Cela aurait le mérite de favoriser la compréhension et le dialogue entre les trois piliers du Droit. Dans cette nouvelle configuration, les étudiants feraient le choix en fonction de leur sensibilité, voire de leur compétence. La formation pourrait atteindre un niveau exceptionnel de qualité, grâce au regroupement des moyens, sans gabegie et perte d’énergie.
Le brassage d’enseignants issus des trois corps produirait un nouvel éclairage sur chaque profession :
• les juges seraient mieux préparés à affronter la réalité sociale du pays avec un objectif d’efficacité ;
• les avocats comprendraient mieux les obligations et les difficultés de rédaction auxquelles sont confrontés les notaires ;
• les notaires trouveraient naturellement un réel partenariat avec les avocats et notamment les spécialistes de l’entreprise.
Service public
Rêvons un peu : le notariat « service public » verrait son champ d’activité se développer en même temps que le conseil, au détriment de certaines activités commerciales, sous l’effet conjugué d’une meilleure compréhension de notre profession par les « pouvoirs publics » et du constat de sa nécessaire existence. L’éloignement des affaires et, par conséquent, la pratique d’un notariat de proximité en tirerait un grand bénéfice ; cela apaiserait les passions, et naturellement, aboutirait à une meilleure entente entre associés, mais aussi entre confrères, voire entre professionnels formés dans le même sérail, sans parler du respect que cela pourrait engendrer… C’est sans doute utopique, mais le notariat européen en germe trouvera facilement un consensus et de nouvelles motivations pour faire évoluer les gouvernants et les Commissions européennes en allant dans ce sens. En revanche, il lui sera très difficile de faire accepter, tant aux confrères des autres pays qu’aux gouvernants, un notaire détenteur du sceau et en même temps régisseur, négociateur, agent immobilier, gestionnaire de patrimoine … cumulard en somme ! Les avocats se battent pour la différence entre le Chiffre et le Droit. Ne devrions-nous pas, dans un but de clarté, « faire nôtre » la différence entre l’exercice du Droit et les pratiques commerciales ?