Nombre d’entre nous sont associés au sein d’une société civile professionnelle. Notre engouement pour les SCP est tel qu’il n’est pas rare que ce sigle soit improprement utilisé pour signaler une autre forme sociétaire. La SCP est-elle pour autant la panacée ? Ne serait-elle pas plutôt une Source de Complications Probables ?

 

À l’origine, la profession ne pouvait être exercée que sous forme individuelle. Puis, devant les besoins, le “mariage” entre notaires ou offices a été autorisé, uniquement sous forme de société de notaires ou de société civile professionnelle. Aujourd’hui, c’est la profusion : SCM (société civile de moyens), SCP (société civile professionnelle), SELARL (société d’exercice libéral à responsabilité limitée), SELAFA (société d’exercice libéral à forme anonyme), SELCA (société d’exercice libéral en commandite par actions), SAS (société par actions simplifiée), SPFPL (société de participations financières de professions libérales)… Les formes d’exercice qui nous sont autorisées sont si nombreuses que l’on s’y perd parfois, au point d’en oublier la signification de leur sigle et d’ignorer leurs avantages ou leurs inconvénients. Le nombre de sociétés ne cesse pourtant de se développer. Et curieusement, ce sont toujours les SCP qui l’emportent haut la main ! Est-ce parce que l’on n’a rien inventé de mieux ? Ou notre « état d’esprit » nous interdit-il d’approcher les sociétés dites de « capitaux » ?

 

 

Difficultés entre associés

L’exercice sous forme sociétaire est-il une nécessité ? Face aux nombreuses difficultés existant entre associés (certains en viendraient aux mains…), on peut se demander si c’est la forme de la société qui est en cause ou s’il ne s’agit pas, tout simplement, d’un manque de maturité de notre part pour l’exercice commun. Il va de soi que le risque de conflit est beaucoup plus important dès lors qu’on s’associe.

 

Prenons l’exemple de la SCP :

• Il s’agit d’un système hybride : d’un côté, on considère toujours l’outil de travail comme « intuitu personnae » ; de l’autre, il faut en partager les fruits alors que, c’est bien connu, il y en a toujours qui ne sont présents que pour la récolte !

• Il y a plusieurs chefs, ce qui peut entraîner des zigzags…

 

Et si, comme le cordonnier, nous étions les plus mal chaussés ?

En effet, combien d’entre nous :

• Analysent sérieusement les différentes formes de sociétés mises à leur disposition et effectuent un réel « choix » ?

• Établissent leurs statuts et ne se contentent pas de recopier des « statuts type » ?

• Réfléchissent réellement à tous les aspects et conséquences de la « vie en commun » ?

 

Certes, nous avons des excuses : les nombreuses formalités à accomplir, le nombre d’obstacles à franchir et les délais qui n’en finissent pas absorbent une bonne partie de notre énergie. Mais est-ce une raison suffisante ?

 

État d’esprit

Qu’on le veuille ou non, un office est une entreprise pouvant être totalement indépendante de son titulaire, et au sein de laquelle celui-ci exerce son activité. Nombre d’entre nous n’ont sans doute pas encore cette manière de voir les choses et considèrent que « leur office » est leur enfant, « leurs clients » leur propriété, y compris en cas d’exercice en commun. Ainsi, de nombreux jeunes diplômés arrivant sur le marché se heurtent souvent à des notaires qui acceptent de partager le titre avec eux, mais rechignent à partager la finance de l’office. Ils tiennent à « garder la maîtrise » totale ! Il est alors difficile de parler d’affectio societatis, et les SCP n’encouragent pas à raisonner dans ce sens. Y a-t-il, dès lors, un véritable intérêt à choisir la SCP, voire à y rester ? L’intérêt fiscal pour les plus gros revenus, en raison du plafonnement des charges, doit-il nous empêcher de choisir une autre forme de société ? Est-ce la peur du changement qui nous freine ? Faut-il y voir une crainte de basculer dans le commercial : rien ne nous oblige à donner un nom à consonance commerciale à l’office… Sans vouloir jeter les SCP aux orties, les sociétés de capitaux offrent plus de souplesse et sont plus propices à éviter les conflits. Elles constituent une véritable évolution de la profession et devraient permettre plus facilement l’augmentation du nombre de notaires. Il y a là un nouveau pas à franchir…