Le notariat est une vieille profession, pétrie de traditions. Mais ses « us et coutumes », à commencer par les élections de nos dirigeants et la cession des offices, ne relèvent-ils pas parfois du folklore ?
Prenons tout d’abord les élections de nos dirigeants, élus, comme dans toute démocratie qui se respecte, au suffrage universel. Encore récemment, des bulletins de couleur différente étaient distribués en cours d’assemblée. Il suffisait alors de les compléter -ou de les modifier-, puis de les déposer dans une boîte à chaussures que l’on se passait de main en main, un peu comme la corbeille à la quête, sans qu’on sache très bien qui avait voté… Mais voilà que certains s’en sont émus jusqu’en cassation, provoquant ainsi l’apparition des isoloirs (au milieu de la salle ?) et la mise en place des listes d’émargement. Qu’est-ce que cela change ?
Peu de choses :
• nous connaissons toujours le nom des futurs élus, souvent plusieurs années à l’avance ;
• il n’y a qu’un candidat pour un poste, pas de débat, pas de programme.
Subtil mélange tenant compte de l’arrondissement et des élus précédents (certains diraient « du tour de l’âne ? »), les pré-élections ont déjà fonctionné. Sommes-nous sur le chemin d’une réelle démocratie ou seulement d’une pseudo démocratie se dotant uniquement des apparences ?
Au fond, c’est sans doute uniquement un peu de notre folklore qui s’en va. Aussi, faut-il relativiser, la profession n’ayant pas forcément à gagner dans une « guerre des chefs ». N’oublions pas notre devise : tous unis ! Ce qui ne doit pas signifier pour autant que nous ne devons exprimer qu’un seul son de cloche ! Demeure cette question : à quand un peu de vraie démocratie, par l’instauration d’une dose de « contrepouvoir » constructif ? La recherche d’un office
Mais il y a peut-être plus grave : la recherche d’un office. Prenons le cas d’un jeune, désireux de s’installer, qui a peu de moyens et peu de relations. Après maints efforts, il finit par dénicher l’office qui lui convient. Le « prix » est un peu élevé, il le sait, mais le cédant ne veut pas en démordre, chacun y allant de ses chiffres et de ses moyennes. Notre candidat se dit, qu’après tout, tout espoir n’est pas perdu pour un « juste prix », les différentes commissions mises en place par la profession étant là pour y veiller. Les démarches s’enchaînent : présentation à la Chambre, présentation au procureur, avis du Conseil régional. Cédant et cessionnaire sont convoqués : le prix est trop élevé. Le cédant ne veut rien entendre. Après une petite leçon de morale, le dossier retourne devant la Chambre. De nouveau, le cessionnaire est convoqué : le prix est décidément trop élevé. Le cédant menace de traiter avec quelqu’un d’autre (peut-être avec un prix officiel et un non-officiel ?). Retour à la case départ. Finalement, le dossier est transmis à la Chancellerie. Peut-être aboutira-t-il ? Mais en tout état de cause, ce sont plusieurs mois de perdus, pour rien…
La mésaventure de ce jeune n’est malheureusement pas un cas isolé, ce qui amène plusieurs questions.
> Les commissions ont-elles un pouvoir ? Si elles n’en ont pas, cela relève alors d’un folklore totalement inutile.
> Le prix de « présentation de la clientèle » doit-il être libre (et dans quelles limites) ou fixé par nos instances ? Dans ce cas, par qui et comment empêcher des dérives ?
> Sommes-nous une activité libérale totalement libre, ou une profession réglementée et « protégée » par un numerus clausus (d’où quelques contreparties) ?
> Verrons-nous un jour des fonds de pension s’intéresser à la vénalité de nos charges et y investir ?
> Que seront les prix de cession dans un avenir proche, compte tenu du régime d’activité soutenu actuel ?
> Combien de jeunes sans argent pourront avoir encore l’espoir de devenir un jour notaires ?
Sans aller jusqu’à un « encadrement des prix » (qui pose d’autres problèmes), pourquoi ne pas assurer la « protection du candidat acquéreur », en exigeant, avant chaque traité de cession, l’établissement d’un rapport d’expertise sur la valeur de l’office ou des parts cédées. Ce rapport pourrait être établi par 2 notaires et 1 comptable désignés par le Conseil régional, et basé sur d’autres critères que le 1/2 net, qui fait plus qu’archaïque. Il serait communiqué au candidat en tout début de ses démarches, et joint au traité de cession. Bien entendu, cela ne règlerait pas tout, mais peut-être cela apporterait-il un peu de « réalisme »…
Il y a comme cela bien d’autres « usages » qui relèvent plus du folklore que d’une réelle nécessité et contre lesquels la lassitude des habitudes ne peut rien. Le notariat serait-il une profession « ronronnante » ?