C’est sur un thème particulièrement d’actualité, celui des personnes vulnérables, que le 102e Congrès a choisi de plancher du 21 au 24 mai, à Strasbourg. L’occasion pour Jacques Combret, président du Congrès, et son équipe, de poser un regard original sur la vulnérabilité et de faire des propositions concrètes…

Spontanément, comme ça, on pourrait se demander quelle mouche a bien pu piquer Jacques Combret, le très charismatique président du Congrès de Strasbourg, lorsqu’il a choisi de s’atteler au thème des personnes vulnérables. Pourquoi ce sujet ? Les personnes vulnérables intéressent-elles les notaires ? Est-il possible d’apporter un regard original sur la question de la vulnérabilité ? Et puis, viennent ces chiffres, bruts, sans appel, qui donnent le vertige tant ils nous disent combien la vulnérabilité est devenue « l’un des problèmes majeurs de notre société ». Jugez plutôt : 2 300 000 personnes ont actuellement plus de 80 ans (elles seront plus de 7 millions en 2040), 135 000 cas d’Alzheimer sont déclarés chaque année, 800 000 mesures de protection ont été mises en place et tout laisse penser que ce mouvement va se poursuivre… La France serait-elle sur le point de devenir « ce formidable laboratoire du vieillissement » prédit par Monique Sassier, directrice générale de l’UNAF (Union nationale des associations familiales) ? Quelles seront « les conséquences juridiques du vieillissement de la population » (Professeur Philippe Malaurie) et surtout comment y faire face ?… Pour le Président Jacques Combret, ce constat constitue un défi pour les familles et notre société. Un défi que le notariat entend bien relever en proposant, lors du congrès de Strasbourg, des propositions concrètes, parfois audacieuses, mais toujours attentives au sort des plus démunis.

 

Le congrès en 4 actes

« Dis-moi comment sont protégées les personnes vulnérables, je te dirai dans quelle société tu vis… ». En adaptant cet adage, Henri Palud, le vice-président du Congrès et Philippe Potentier, le rapporteur général, ont parfaitement résumé la teneur de ce 102e congrès. Certes, l’exercice est délicat tant le sujet est vaste, mais l’objectif s’en trouve renforcé : mettre à la disposition des personnes vulnérables une « boîte à outils » efficace et créer ceux qui manquent. Pour y parvenir, les travaux vont s’articuler autour de deux principes qui se complètent et synchronisent le droit des personnes vulnérables : le principe de nécessité (toute personne vulnérable a besoin d’être protégée) et le principe de subsidiarité (car la protection est parfois liberticide). Sous la houlette de Philippe Potentier, le rapporteur général, les rapporteurs seront répartis en quatre commissions.

 

> Dans la première commission, co-animée par Jean-Éric Garonnaire (Saint-Étienne) et Florent Picot (Lyon), l’accent sera mis sur l’aide à la personne et ses besoins fondamentaux (un toit, des ressources, un accompagnement dans la gestion des ressources).

 

> Dans la seconde commission, les réflexions de Jérôme Klein (Lille) et de Florence Gemignani (Paris) seront davantage orientées vers la protection de la personne toute entière (et pas seulement de son patrimoine). Lorsque l’incapacité sociale débouche sur l’incapacité civile tout court, on entre dans la vulnérabilité. Avec la réforme projetée du statut des personnes protégées, notamment des tutelles, le Congrès sera ici en pleine actualité…

 

> Mais le droit doit permettre de chercher et de favoriser des alternatives à l’assistance ou à la protection de la personne vulnérable, dans son être et dans son avoir. C’est tout l’enjeu de cette troisième commission qui, sous la conduite de Nathalie Couzigou-Suhas (Paris) et de Yann Le Levier (Moncontour de Bretagne), explorera « les figures libres d’assistance » de la personne. Si certains instruments juridiques nous sont familiers, ils sont souvent peu utilisés ; d’autres figures, plus innovantes, pourraient être promues. C’est notamment le cas du mandat de protection future qui existe déjà à l’étranger (au Québec, en Allemagne, en Espagne…) et permet de concevoir sa propre incapacité.

 

> Enfin, la quatrième commission (« Les alternatives patrimoniales ») s’attachera plus spécifiquement au patrimoine et au volet financier. Gérard Crémont (Lavaur), Henri Lenouvel (Marseille) et François Loustalet (Pau) revisiteront les nombreuses techniques juridiques dont notre droit fourmille et tenteront notamment de ressusciter « le bail à nourriture ».

 

Espérons qu’à Strasbourg, les notaires sauront se mobiliser pour proposer, avec l’équipe du 102e Congrès, des solutions respectueuses de la volonté de chacun, et pour compléter cette fameuse « boîte à outils » au service des personnes vulnérables en créant les figures d’assistances qui manquent…