Le libéralisme encadré, c’est le notariat et l’authenticité. Explications par l’exemple !

 

MOI : Toi qui as souvent enfourché le cheval du libéralisme, critiquant les contrôles et prônant un certain mode de fonctionnement basé sur la liberté ainsi qu’une sanction rapide et sévère des dérapages, tu dois être dans tes petits souliers avec la crise financière issue des Etats-Unis ?

Moi : C’est que tu m’as très mal lu. Au contraire, je jubile…

MOI : Tu n’es plus un adepte du libéralisme ?

Moi : Comme avant la crise, je crois au libéralisme contrôlé, et surtout à la liberté sans œillères. Regarde comme on assiste partout à la disparition des idéologies pour sortir le monde de la crise. Qui aurait imaginé que les dirigeants des Etats-Unis ou de l’Angleterre feraient appel à l’Etat pour sauver des entreprises bancaires ?

MOI : Une partie des Républicains a longtemps résisté, considérant qu’il n’était pas moral d’épargner des dirigeants qui avaient failli. Conviens qu’ils n’avaient pas tort !

Moi : C’est clair. Mais laisser périr quelques entreprises au prétexte de la faillite de leurs dirigeants, c’était conduire le pays à la ruine et donc les plus pauvres à la misère. Il fallait sauvegarder le système, quitte à renoncer à quelques dogmes. Nous pouvons espérer en contrepartie des réformes, un changement de valeurs, commencé par exemple avec la dénonciation des parachutes dorés.

MOI : As-tu noté le propos d’Alain Minc constatant que les trois systèmes financiers qui résisteront le mieux en Europe sont ceux de l’Italie, de l’Espagne et de la France ? Pourquoi à ton avis ?

Moi : Ce sont des pays latins… Non, ce sont des pays où les banques sont contrôlées sévèrement par des règles mises en place par l’Etat afin de préserver la sécurité des consommateurs.

MOI : Exactement. La France est surendettée, ce qui n’est pas un bon exemple d’administration de l’Etat, mais les entreprises privées sont contrôlées par l’Etat, ce qui correspond à ses prérogatives, et nous en ressentons les bienfaits.

Moi : Tu en tires quelles conclusions ?

MOI : Je trouve que cette crise montre magistralement les dérives dans lesquelles ne doit pas s’abandonner un Etat responsable, au prétexte de casser une profession enviée, de lutter prétendument contre le chômage et de satisfaire le lobbying des avocats pour tout dire… Ces derniers se sont montrés incapables d’endiguer leur nombre, d’organiser leur profession, de gérer leur avenir, qu’ils assument ! On leur bourre le mou avec le pactole du notariat. Il faut d’ailleurs voir comment ils sont remontés contre les notaires, même à titre individuel… C’est impressionnant !

Moi : La majorité des avocats a faim … Le lawyer américain, véritable superman tous azimuts, leur paraît être un modèle et la commission de Bruxelles ne rêve que de déréglementation, de libre marché où s’exercerait la concurrence à plein pour faire baisser les coûts. Comme si c’était le propos en ce qui concerne les notaires, eux qui sont soumis à un tarif fixé par l’Etat !

MOI : C’est pourquoi je te dis que, pour la survie du notariat, on ne pouvait rêver mieux que cette crise du libéralisme américain. Nous pouvons enfin constater « de visu » que le libre marché est incontrôlable dès lors que les passions humaines s’emballent. Seul un Etat démocratique peut fixer des règles de protection pour les citoyens et faire régner un ordre juste dans la société.

Moi : Qui peut croire que des milliers d’avocats ayant la capacité de tout faire dans le domaine juridique assureraient la paix dans les familles, la sécurité dans le traitement des affaires commerciales, le respect des règles fiscales… Qui ?

MOI : A moins d’être idéologue, il est évident que le notariat doit être réorganisé comme n’importe quelle structure privée ou publique pour répondre à l’évolution du monde, mais sûrement pas supprimé, bouleversé, ouvert, transformé en une profession unique du droit. Moi : Alors, depuis la crise, tu es convaincu que la raison l’emportera sur les égoïsmes, les idéologues et les lobbies ? Tu es plus serein pour les confrères ?

MOI : J’ose l’espérer… En tous les cas, le notariat dispose d’une magnifique leçon, grandeur nature, des méfaits du libéralisme pur et dur et de la déréglementation. Notre profession dont la Loi de Ventôse, base de notre organisation, est issue de la Révolution, offre au contraire la preuve de la réussite d’une organisation juridique au service du citoyen dans un cadre libéral contrôlé par l’Etat. Merci Monsieur le Conseiller Réal. Vous fûtes décidément un sacré visionnaire !