Théorème de sociologie juridique Le niveau de difficultés à franchir par ceux qui cherchent à obtenir un statut est d’autant plus élevé que les mesures de protection de ceux qui en bénéficient sont fortes.
Ce théorème « de sociologie juridique », labellisé Notariat 2000, s’applique, les notaires le savent bien, notamment :
• À ceux qui veulent bénéficier du statut du fermage… Sans doute est-il plus difficile de devenir agriculteur que chauffeur de taxi lorsqu’on n’est pas soi-même fils d’agriculteur ;
• À ceux qui souhaitent louer un appartement : le statut protecteur du locataire, les difficultés à expulser un locataire de mauvaise foi et à se faire payer, obligent les propriétaires à exiger des garanties qui étaient superfétatoires il y a un siècle, mais qui empêchent les candidats locataires sérieux et de bonne foi de trouver un logement ;
• Aux salariés qui cherchent un emploi CDI : la sélection des candidats, opérée par l’employeur, ne dépend pas tant de la personnalité du postulant que de l’adaptabilité de la masse de ses salariés à une conjoncture économique.
Mais les notaires ont-ils compris que ce théorème s’applique aussi à leur profession ?
Course d’obstacles en fin de Master 1
Quels obstacles doit franchir le candidat notaire, titulaire des quatre premiers examens en droit, soit au niveau du Master 1 ?
• Tout d’abord, il doit trouver une Faculté qui l’accueille en Master 2. Ce n’est pas facile (voir notre dernier numéro), car il ne s’agit pas d’un concours qui donnerait objectivement ses chances à tous. La réponse stéréotypée, telle qu’elle est illustrée ci-après, montre que les candidats ne sont pas jugés sur leurs valeurs, mais sur une « capacité d’accueil ».
• Ensuite, le candidat notaire doit trouver un stage : c’est plus facile s’il est d’une famille notariale.
• Enfin, il devra rechercher un office à céder ou des parts de société à acheter.
Le manque d’organisation du marché, la confidentialité voulue par ceux qui souhaitent céder mais ne veulent pas le faire savoir, le coût élevé des prix des offices (je me suis laissé dire par des candidats notaires que certains cédants demandaient des « dessous-de-table », mais je n’ose y croire), tout cela contribue à cantonner le notariat dans la niche des professions protégées. On est loin de la volonté politique, clairement affichée, de l’ouverture à la jeunesse et de l’augmentation du nombre des notaires. Peut-être l’université devrait-elle faire son mea culpa, mais le notariat devrait veiller à ne pas cultiver un malthusianisme stérile.