Après « Le Canard Enchaîné », c’est au tour du Figaro de titrer sur « La cagnotte secrète des officiers ministériels » dans son numéro du 12 octobre. Dans le même temps, Laurence de Charette et Denis Boulard publient « Les Notaires ».

 

« Je tremble qu’il n’ait soupçonné quelque chose de mon argent » L’Avare, Molière

Acte 1 -> Un secret ?

Harpagon : ne serais-tu point homme à faire courir le bruit que j’ai chez moi de l’argent caché ? La Flèche : vous avez de l’argent caché ? Harpagon : non, coquin, je ne dis pas cela. Je demande si malicieusement, tu n’irais point faire courir le bruit que j’en ai. Le Figaro : à UNOFI… Le CSN : qu’est-ce que tu dis ? Le Figaro : UNOFI pèse plusieurs milliards d’euros… Le CSN : de qui veux-tu parler ? Le Figaro : d’UNOFI, un véritable empire financier… Le CSN : te tairas-tu ? Le Figaro : non, enfin peut-être…

 

Acte 2 -> Le Figaro ne se tait pas

C’est ainsi qu’on apprend que Pascale Fombeur, ancienne directrice des Affaires civiles et du Sceau, tente vainement d’élever la voix. Qu’une lettre adressée au président du CSN, signalant l’anormalité de la situation d’UNOFI, est restée sans réponse. Que seule une petite poignée de confrères serait dans le secret des Dieux. Puis la succession du président Ferret est évoquée. On apprend que va être élu, au moyen d’un « scrutin de façade », Benoît Renaud et, dans 2 ans, Jean Tarrade. Les journalistes sont mieux renseignés que les notaires de province (quoique), mais ils ne révèlent qu’un secret de polichinelle pour les notaires avertis qui font partie du « cercle des initiés ».

 

Acte 3 -> Enquête sur les notaires

Décidément, l’actualité est riche ! Laurence de Charette et Denis Boulard sortent un ouvrage, qualifié d’enquête, sous le titre « Les Notaires » (Robert Laffont). Rien de nouveau sous le soleil, mais des histoires comme on en lit à propos de tous les milieux, qu’il s’agisse de politiques, de Francs-maçons, de catholiques ou de médecins. Tous les clichés, y compris les plus éculés, passent au fil des pages, et l’on rencontre, sans surprise, l’ineffable Gisèle Néron. Qui sait ce qu’est un marronnier dans la presse ? Il y a, en tout cas, des facilités que de bons journalistes pourraient éviter. La clarté de nos factures en prend un coup, mais ce n’est pas typiquement notarial. C’est simplement français et très représentatif de notre côté administratif, donc compliqué. Ceci dit, le CSN pourrait sûrement parvenir à un résultat acceptable par tous. Bref, j’ai lu ces pages avec attention, éprouvant parfois des frissons de satisfaction à l’énoncé de certaines affirmations. Sous les titres « La machine de guerre », « le lobbying » ou « l’internationale des notaires », on éprouve le sentiment d’être hyperpuissant. On se prend à penser qu’on est représenté par les meilleurs, et que notre statut résistera à toutes les attaques, comme les phalanges romaines !

 

Acte 4 -> Les comptes troubles du notariat

Voilà une entête de chapitre déstabilisante. Imaginez qu’un inspecteur qualifie de « troubles » les comptes d’une étude… Que croyez-vous qu’il arriverait ? Et nous voyons défiler l’histoire du CSN et de Claude Mineraud, comme un mauvais roman. Envisageriez-vous de ne pas répondre à une lettre du Procureur de la République ? Probablement pas. Au CSN, selon les journalistes, on ne répond pas à la Chancellerie, car on est sûr de soi et peut-être intouchable. Il paraît que tout va se terminer sagement et favorablement pour nous, puisque les milliards évoqués devraient atterrir à la Fondation des notaires de France.

 

Acte 5 -> Et demain ?

L’avenir ne sera pas forcément rose, nous dit-on. Page 256, Bernard Monassier, présenté comme l’un des notaires qui comptent le plus, affirme : « Dans les quinze prochaines années, soit le notariat évolue, soit il disparaîtra ». Il paraît que l’éminence grise de Nicolas Sarkozy nous veut du mal et met en sursis notre existence… Alors, in fine, qui vaincra ? Les ministres qui passent ou le notariat, qui comme l’église, demeure une institution ?