En une quinzaine d’années, après la crise des années 90, le marché immobilier français a connu un développement considérable. Dans ce contexte d’évolution rapide très favorable à l’activité immobilière, les notaires semblent avoir perdu une partie de leurs atouts.

 

Le nombre de transactions immobilières réalisées en France chaque année est un chiffre malaisé à connaître, car il englobe : • plusieurs types de biens (logements anciens ou neufs, terrains, immeubles entiers), • plusieurs acteurs (particuliers, Sociétés d’investissements, Sociétés d’HLM)  • et des taux d’imposition qui diffèrent parfois suivant le régime fiscal adopté.

 

Le nombre des transactions

Source : Jacques Friggit, « Nombre de transactions de logements anciens », Etudes foncières

 

Le graphique n°1 a été élaboré pour le Ministère de l’écologie et de l’aménagement du territoire à partir du rapprochement des bases de données notariales et l’assiette des droits de mutation perçus par la Direction Générale des Impôts. Bien que très précises, les données ne concernent que les transactions sur l’ancien réalisées par les particuliers.

Sur ce marché des appartements et des maisons anciens, le nombre est ainsi passé de 498 000 transactions en 1992 à 824 000 en 2005. Soit une augmentation de 65 % du volume des affaires. Cette expansion a été suivie d’une chute d’activité depuis 2005, ramenant cette croissance à 43 % en septembre 2008. Pour avoir des résultats plus globaux, ces chiffres peuvent être complétés par ceux du Crédit Foncier sur le marché du neuf (accédant et investisseurs). Le nombre total avoisinerait alors 1 160 000 transactions pour 2007 et 966 000 pour 2008. Soit une chute proche de 20 %.

 

La part des notaires Répartition du marché de la négociation de logements anciens.

Les données fournies par l’Insee à partir des enquêtes logement ne concernent que l’acquisition de logements anciens par des propriétaires qui en ont fait leur résidence principale, soit environ 60 % des transactions sur ces logements. Elles ne tiennent donc compte ni des logements locatifs achetés par les investisseurs, ni des transactions sur logements neufs. Au début des années 60, notaires et agents immobiliers détenaient à part égale prés de 40 % du marché. Depuis, la part des premiers a été divisée par trois, passant de 18 % à 6 %, tandis que celle des seconds a triplé. Cette part croissante des agents immobiliers s’accompagne d’une tendance inverse dans les transactions directes entre particuliers, ce qui contredit la mauvaise réputation faite à cette profession. En appliquant les proportions obtenues aux transactions globales de l’année 2007, on obtiendrait les chiffres suivants : environ 700 000 pour les agents immobiliers, 70 000 pour les notaires, 170 000 directement par petites annonces et 220 000 par relations personnelles. Mais, il faut se garder d’accorder trop de valeur à ces résultats car, rien ne dit que les proportions soient transposables.

 

Quelques raisons apparentes…

L’une des premières raisons tient au fait qu’il s’agit d’une activité dite « accessoire » et quelle est assortie de modalités parfois contraignantes. Ce qui en éloigne une majorité de notaires alors qu’ils ont pourtant toutes les compétences nécessaires. Or, il y a là un manque à gagner et un défaut de positionnement évident. Si, la part des notaires avait pu se maintenir autour de 20 % comme dans les années 70, le montant des honoraires complémentaires enregistré par la profession avoisinerait actuellement le milliard d’euros par an. Parmi ces contraintes, le nombre des études est pratiquement fixe alors que celui des agences immobilières a explosé ces dernières années. En outre, l’affichage y est très réglementé. Les banques qui lorgnent avec insistance sur ce même marché, après avoir testé l’affichage des produits à vendre dans leurs locaux, ont préféré créer des antennes spécialisées pour ce faire. Le problème des honoraires paraît être aussi un frein à ce développement. Le système actuel d’honoraires proportionnels prêche contre l’exclusivité et surtout amène nombre de particuliers à éviter cette intermédiation. D’autant qu’à l’étranger la rémunération des courtiers se situe souvent à un niveau très inférieur pour des prestations équivalentes. Certains d’entre eux abandonnent d’ailleurs ce type de tarification pour le remplacer par un forfait plus ajusté que se partagent les deux parties. En effet, en cas de baisse des prix, c’est plus le vendeur que l’acheteur qui requiert un intermédiaire pour trouver une contrepartie. C’est donc à lui de supporter tout ou partie des frais.

 

Mais, quelles que soient les raisons de ce rendez-vous manqué avec le marché immobilier du XXIème siècle, la nécessité d’une mutation dans les méthodes d’approche semble l’un des enjeux de ces prochaines années. Une première étape a été franchie dans ce sens avec l’organisation des Conventions Négociation par les notaires girondins. Surtout, la crise qui incite au redéploiement des moyens, tout comme les nouvelles possibilités offertes par internet, devraient faciliter une reconquête partielle de ce marché indispensable à l’élargissement d’un métier attaqué de toute part.