Les banques et les avocats se mobilisent déjà sur l’international. Le notariat semble plus sage. C’est pourtant un véritable challenge qui s’offre à lui car le marché est là, en France comme à l’étranger.
Chacun de nous a sa « propre » vision du notariat. Toutes ces visions sont certes « la réalité de chacun », mais… dans le cadre de son étude, c’est-à-dire avec une focale ultra-courte (ce qui est compréhensible). En voici quelques exemples.
• Le notariat ou l’inadéquation à l’international
L’international est l’exemple parfait de l’inadéquation structurelle du notariat au marché. « Je n’en fais pas assez pour m’y intéresser personnellement » disent certains confrères. Leur vision est juste, il y a tellement peu de cas d’extranéité dans sa propre étude. « Je n’en fais pas assez » n’est d’ailleurs pas une réflexion propre à l’international. C’est la même en matière de gestion de patrimoine, de médiation, de régie, de négociation, de propriété intellectuelle, de sociétés…
• Le notariat ou la prudence !
Celui qui appellerait les confrères de sa compagnie à une synergie, serait vu comme un prétentieux, un confrère dangereux, voire un « piqueur de clients » sur les autres actes. Il s’exposerait en plus aux foudres de l’art. 4, la totale ! Par ailleurs, aucun « mammouth notarial » n’a la taille suffisante pour le marché, pour pouvoir agir partout. Le notaire étant un sage, il ne court qu’un lièvre à la fois.
• Le notariat ou le repli
La création d’un « réseau » d’études répond à ce souci de couvrir des « minimarchés », mais il est ressenti comme « excluant ». Pour presque tous, le « vrai » réseau, c’est le notariat. Bien qu’utiles, les réponses du Cridon ne suffisent pas à la pratique. Chacun est donc ultra prudent face à une procuration marocaine, à une plus-value espagnole, etc. Le notariat se replie dans sa coquille.
« Vision grand angle »
Pour l’international, il faut un grand angle et recadrer l’outil opérationnel à l’échelon national, pas seulement voir à travers la focale ultra-courte de chaque étude.
• Le notariat ou l’appel à la vision internationale ancestrale
Si nous sommes là, c’est parce que les notaires de la Renaissance ont sillonné l’Europe et inventé tous les outils qui ont créé « Votre » étude ! Aujourd’hui, l’ouverture internationale est tout aussi forte, mais le notariat reste paralysé. Le verrou de la compétence géographique doit-il tout excuser ? Notre Garde nous a indiqué vouloir le faire sauter et le commissaire européen Jacques Barrot n’a de cesse de nous solliciter. Il FAUT retrouver notre vision ancestrale !
• Le notariat ou l’international à sa portée
En France, tout d’abord, selon le Quai d’Orsay, des milliers de dossiers de successions ne seraient pas traités du fait de notre carence. À l’étranger ensuite, 2 millions d’expatriés français sont inscrits dans les consulats (on estime qu’1 million ne seraient pas inscrits). Qu’attendons-nous pour former certains notaires en droit de différents pays ? Nous pourrons dans un proche avenir signer sur place, voire organiser des « tournées » pour « rentabiliser les affaires ». Si le notariat veut avoir l’appui du Quai d’Orsay pour suppléer les services notariaux des Consulats qui n’auraient plus alors de sens, il doit respecter deux préalables : d’une part, copier la couverture des Consulats de France dans les pays riches et aussi moins riches et, d’autre part, pratiquer un tarif qui ne soit pas dissuasif. Comment imaginer que les petites caisses locales du Crédit agricole arrivent à spécialiser une agence complète à l’international depuis des lustres et pas nous ? Cela devrait nous faire l’effet du tocsin. Ces agences travaillent de plus avec des cabinets d’avocats, faute de trouver réponse dans nos rangs. Un office notarial spécialisé en droit international, sans exclusivité, et une offre culturelle notariale constitueraient une vitrine phare de notre profession (1).
(1) Rapport du Congrès MJN de San Francisco 1997(Me Annie Rollet p156-157, Vivien Baufumé p 331, Sabrina Hadida p 343).
Le grand chef cuisinier Paul Bocuse soutient le notariat et l’invite à mettre le cap sur l’international. Voici le petit mot, toujours d’actualité, qu’il écrivait à l’intention des notaires en 2007, à la demande d’Yvon Rose, alors Président du Congrès MJN sur l’Economie et le Droit.