Entre notaires français et solicitors britanniques Le 19 novembre dernier, les notaires de Paris sont allés à la rencontre des solicitors de Londres pour une journée de présentation mutuelle des deux professions (Cf. N 2000, n° 462, p. 38). Ce séminaire a essentiellement été consacré à la description, dans chaque système de droit, du processus de règlement d’un dossier de vente et d’un dossier de succession. Au-delà de ces échanges, quel est l’intérêt, pour les solicitors britanniques, et réciproquement, pour les notaires français, de prolonger l’expérience ?

 

Si l’on considère l’engouement de nos concitoyens d’outre-manche à venir en France pour y  » investir  » peu à peu nos campagnes françaises, en y réalisant des acquisitions immobilières, d’abord à titre de résidences secondaires, puis, dans une proportion de plus en plus significative, à titre de résidences principales, l’on peut comprendre l’intérêt pour les solicitors de mieux connaître les arcanes du système juridique français… Les solicitors peuvent avoir une mission de conseil préalable à jouer, et pour cela, il y a pour eux une impérieuse nécessité de  » se mettre à la page « . Certains cabinets britanniques ne s’y sont d’ailleurs pas trompés, créant en leur sein une équipe dédiée à l’accueil de la clientèle britannique désireuse d’investir en France.

 

Les nouveaux défis

Face à une telle situation, il était nécessaire que le notariat français fasse connaître outre-Manche le rôle central, voire incontournable, de notre profession. Si elle produit les effets escomptés, une telle démarche permettra que la clientèle britannique se tourne naturellement vers les notaires français pour les actes de la vie juridique les concernant en France. Pourrons-nous alors crier  » Victoire  » ? Cela implique tout d’abord que le notaire sache bien s’exprimer en anglais, avec les termes appropriés en matière juridique. Cela passe nécessairement par un effort au niveau de la formation dispensée en anglais dans nos universités, mais, peut également se traduire, comme c’est déjà le cas dans certaines études, par l’envoi d’un collaborateur outre-Manche pendant une période donnée, de manière continue ou alternée. En revanche, la maîtrise du droit tel qu’il existe et est pratiqué outre-Manche suppose que le notaire ait suivi ce type de cursus (travail à l’étranger) ou soit déjà doté d’un diplôme d’anglais juridique ou de droit anglais. En soi, ce n’est pas impossible, mais c’est une véritable gageure ! Et alors ne faudra-t-il pas en faire de même avec les hollandais, les danois, les allemands et les tchèques ? Et qui d’autre encore ? D’où l’utilité cruciale, voire vitale, que présenterait la création des réseaux mono ou pluriconfessionnels (comme cela pourrait être le cas avec les solicitors par exemple).

 

Réseaux mono ou pluriconfessionnels

Ces réseaux nous permettraient de rendre à la clientèle concernée le service qu’elle est en droit d’escompter de la part d’un professionnel reconnu et compétent dans son pays d’origine. C’est en collaboration avec son correspondant étranger que le notaire pourrait en effet pleinement exercer sa mission, en conseillant utilement son (leur) client, relativement aux actes qu’il aurait à dresser pour son (leur) compte. On éviterait ainsi les insuffisances et les errements, parfois constatés en ce domaine, le notaire étant souvent confronté au barrage de la langue ou de la culture juridique de son client, voire tout simplement supplanté par un autre professionnel étranger ayant intégré en son sein une équipe spécialisée en droit français… dont l’ambition est de conseiller ses clients, aux lieu et place du notaire français, dans leur démarche d’acquisition d’un immeuble ou de règlement d’une succession en France par exemple. Au contraire, le recours à deux professionnels correspondants l’un de l’autre, complémentaires et respectueux de leurs spécificités respectives, permettrait à chacun d’eux de pleinement exercer sa mission, sans  » empiéter  » sur celle de l’autre, tout en valorisant leurs savoir-faire auprès de leurs clients communs. De telles initiatives seraient source de progrès et de valorisation de la mission qui nous est confiée, en notre qualité de notaires français, destinés à devenir les acteurs d’un marché du droit en pleine mondialisation.